28 Octobre 2014
Entretien dans Synergie , le magazine du groupe Eiffage
→ Pierre Mansat, président de l’Atelier international du Grand Paris
« Nous devons faire la preuve qu’il est possible
de construire une métropole raisonnée »
Comment le projet du Grand Paris
a-t-il évolué depuis les premières
ébauches ?
Le projet du Grand Paris a
indéniablement provoqué un
bouillonnement d’idées. Cela s’est
traduit à la fois par une réflexion de
nature institutionnelle – les rapports
entre Paris et sa banlieue – initiée
par Bertrand Delanoë [alors maire de
Paris] en 2001 et par la consultation
internationale sur le Grand Paris lancée
en septembre 2007, pour laquelle dix
équipes ont rendu leurs conclusions
en mars 2009. Cette consultation a été
un formidable accélérateur. Depuis,
les projets émergent de toutes parts.
Nous avons ainsi recensé 675 projets
de toute taille dans la Métropole, qu’il
s’agisse de rénovation urbaine, de zones
d’activités, d’infrastructures diverses ou
d’équipements publics. Cette première
phase a été suivie d’une autre, plus
intime, de réflexion – notamment sur
l’habitat et les systèmes métropolitains.
Où en est le projet et quelles sont
les grandes phases à venir ?
Nous sommes aujourd’hui dans une
troisième phase de mise en forme
du projet métropolitain sur la base
d’éléments de programme déjà définis
qui sont très forts, notamment en
matière de logement et de transports.
D’ici à début 2016, date de la mise en
place de l’institution qui permettra à la
Métropole du Grand Paris de fonctionner
efficacement, l’Atelier international du
Grand Paris dégagera les lignes de force
du projet métropolitain. Le moment sera
alors venu de se réinterroger sur le rôle de
la structure que je préside.
Comment définissez-vous le rôle
de l’Atelier international du Grand
Paris, notamment par rapport à la
Société du Grand Paris ?
L’Atelier international du Grand Paris est
un laboratoire de recherche-actions où 14
équipes pluridisciplinaires réfléchissent
aux meilleures façons d’optimiser
l’existant et de faire évoluer le Grand
Paris, ville mondiale. Son rôle est de
dégager une vision cohérente et solidaire
car les inégalités territoriales posent
problème aux populations et handicapent
son attractivité. Nous travaillons de plus
en plus en lien avec la Société du Grand
Paris, qui est le maître d’ouvrage d’une
pièce maîtresse du Grand Paris, à savoir
l’infrastructure de transport.
On résume en effet souvent le
Grand Paris au super-métro…
Effectivement. Le transport est
une dimension majeure du projet,
notamment via la construction de
ce nouveau métro qui va modifier
radicalement l’organisation de la
Métropole. Mais le Grand Paris, c’est
aussi la question du logement – il
faut en construire 70 000 par an –, de
l’environnement et de la solidarité entre
collectivités. La métropolisation n’est
pas un phénomène irrépressible, dont on
n’a plus la maîtrise. Nous devons faire
la preuve qu’il est possible de construire
une métropole raisonnée.
Quelle contribution un groupe
comme Eiffage peut-il apporter à la
réflexion sur le Grand Paris ?
La distance entre décideurs politiques
et entrepreneurs est trop grande, je le
regrette. Les grands groupes de BTP qui
contribuent à faire la ville un peu partout
dans le monde, ont un savoir-faire, de
l’expérience. Ils se préparent au Grand
Paris, ont nommé des responsables
pour les projets à naître. Je suis de
ceux qui pensent qu’il faut approfondir
nos réflexions en commun, donner
une ambition plus collective à cette
effervescence.
Plus globalement, diriez-vous que
la construction du « Grand Paris »
est novatrice ?
Oui. Je pense que la planification à
l’ancienne a vécu. Le Grand Paris est
un « projet permanent ». Rien n’est figé,
nous devons savoir faire évoluer notre
projet dans le temps si nécessaire. Cela
ne facilite pas la communication auprès
du grand public. Il est vrai que les
images fortes issues de la consultation
internationale, de tours, de parcs…,
donnaient une matérialité plus grande
à ce projet de Métropole. Mais l’Atelier
international du Grand Paris s’efforce
de partager largement ses réflexions
via ses publications, des expositions
qui portent, par exemple, sur l’habitat,
ses recommandations notamment sur
la conception des gares… Je souhaite
toutefois renforcer notre communication
auprès des citoyens, pour qu’ils
mesurent ce que ce projet leur apportera.
Avec le Grand Paris, comment la
région Île-de-France se positionnerat-
elle par rapport à d’autres
métropoles comme le Grand Londres
ou la Randstad aux Pays-Bas ?
Il me semble que le temps est venu
de ne plus considérer ces métropoles
d’Europe occidentale comme des
concurrentes mais comme faisant partie
d’une mégalopole capable de peser au
niveau mondial. Les territoires doivent
être pensés comme des systèmes
ouverts, en interaction avec ce qui les
entoure. Nous avons tous intérêt à
travailler dans le sens d’une plus grande
complémentarité. L’Atelier international
du Grand Paris comme la mairie de
Paris ont engagé des discussions,
notamment avec les représentants de
la capitale britannique. Paris, beaucoup
moins spécialisée que Londres, a de
formidables atouts et richesses