6 Mai 2008
Le maire de Paris ne veut pas être le chef du Grand Paris. Il le dit pour la première fois (lire ci-contre). Est-ce pour viser plus haut ? Bertrand Delanoë cache de moins en moins ses ambitions. Il consulte, reçoit, écoute, s'apprête à publier un livre. En ligne de mire, le PS, peut-être, l'Elysée en 2012 aussi
SIBYLLE VINCENDON
Delanoë voit au-delà du Grand Paris
Le maire de la capitale déclare à «Libération» ne pas vouloir diriger le «Grand Paris». Pour se préparer à un destin national ?
Paradoxalement, en renonçant à diriger le Grand Paris, il permet à ce projet d'exister: sa non-candidature peut débloquer les réticences des 29 maires de la première couronne, inquiets de voir leur puissant voisin grossir encore. La Conférence métropolitaine lancée en 2006 par Paris et quelques villes pionnières comme un club informel n'engageant à rien, pourra passer à la vitesse supérieure et tenir en juin ses Assises sans l'encombrante ombre portée d'une domination parisienne.
Cela n'évacuera pas toutes les peurs. Et en particulier, celle qui touche au logement. Une future métropole devra sans doute contraindre les communes qui bâtissent trop peu ; et les villes les plus proches de la capitale font déjà savoir qu'elles refusent d'être utilisées comme un «déversoir».
Autre inquiet : Jean-Paul Huchon, président (PS) de l'Ile-de-France. Lui ne veut aucune structure centrale. Cela marginaliserait la grande couronne et affaiblirait la région, estime-t-il. Il en a fait son combat et accuse la droite de transformer cette bataille en marchepied pour les régionales de 2010. L'omniprésence de l'UMP Roger Karoutchi, chef de file de l'opposition régionale, peut justifier ces craintes.
Le Grand Paris contient une grosse dose de politique. Elle a été introduite brutalement par Nicolas Sarkozy en juin 2007 quand il a évoqué une «communauté urbaine» pour Paris. Octobre suivant, il remet ça en annonçant, par-dessus la tête des élus, une consultation internationale d'architecture.
Mais depuis, le résultat des municipales ne l'a guère servi. Certes, il a nommé Christian Blanc secrétaire d'Etat à la Région capitale et une loi de création de la métropole a été annoncée pour 2009. N'empêche, Christian Blanc usine le Grand Paris dans une discrétion remarquable. Rencontrant des élus et des présidents de groupes comme Véolia ou France Télécom, il paraît surtout chercher des partenaires privés pour des grands projets. Au moins pour la rocade de métro interbanlieue Métrophérique. L'Etat n'a encore rien mis sur cette ligne à 5,5 milliards d'euros.
Les résultats du concours d'architecture, début juin, apporteront peut-être des idées au gouvernement. Il n'a pas utilisé les travaux de la Conférence métropolitaine, boudée par l'UMP. Il ne s'est pas jeté non plus sur le rapport du sénateur (UMP) Philippe Dallier qui veut fusionner les quatre départementaux centraux de la région. Et surtout, il ne dit rien des péréquations financières qu'impliquera une métropole. Nul ne sait ce qui sera prélevé sur le trésor du bastion UMP des Hauts-de-Seine. Embarrassant Grand Paris.