Ecrire à plusieurs est toujours compliqué, surtout quand on n’est pas d’accord sur ce que l’on à dire. Malgré cet obstacle, les élus locaux de la mission de préfiguration de la métropole du Grand Paris ont réussi à finaliser ce samedi un texte dessinant une gouvernance, et les mécanismes financiers qui vont avec.

Sur la gouvernance, leur texte préconise la création de deux niveaux d’intercommunalité (EPCI): un pour la métropole et un second pour les territoires qui la composent. Dans la loi, une commune ne peut pas être membre de deux EPCI à la fois mais les élus proposent de modifier cette donne pour tenir compte de la taille hors norme de l’ensemble parisien (6 millions d’habitants). Inconvénient de la formule: elle rajoute une couche institutionnelle avec trois étages.

Pour les élus, ce montage offre l’avantage de permettre aux territoires d’avoir une ressource fiscale, ce que la loi métropoles leur interdit. Cette forme de répartition des impôts entre les niveaux de la métropole et des territoires est défendue bec et ongles par une grande majorité des élus, qui tiennent à garder autant que possible la maîtrise de leur territoire. Mais elle est contradictoire avec l’intention gouvernementale de faire de la métropole un puissant instrument de redistribution.

Néanmoins, les élus de la mission de préfiguration de la métropole ne seraient jamais parvenus à un accord sans passer par une solution de ce type. Que ce soit à gauche, avec Anne Hidalgo, ou à droite, avec Patrick Devedjian, les grands élus parisiens tiennent à une formule dans laquelle ils restent un minimum maître du jeu.

Autre point de friction que le texte résout à sa façon: la planification urbaine. Avec la loi métropole, en principe, fini les plans locaux d’urbanisme (PLU) que chacun bricole dans son coin. La métropole doit avoir un PLUI (intercommunal). Pour certaines communes des Hauts-de-Seine en particulier mais pour pal mal d’autres élus aussi, le PLUI est une atteinte inacceptable aux pouvoirs des maires.

Du coup, l’accord dessine une voie de sortie assez audacieuse: laisser les communes élaborer leur PLU mais placer au-dessus un schéma de cohérence territoriale (SCOT) métropolitain. Autrement dit, un document dont la force prescriptive n’est pas certaine.

Que cet accord rencontre ou pas l’accord de Manuel Valls pour devenir une base de la discussion parlementaire, il aura en tout cas révélé d’intéressants «bougés» politique. En acceptant de partager une part de la fiscalité économique avec la métropole, Patrick Devedjian, président du conseil général des Hauts-de-Seine, vient sur le terrain de la gauche parisienne et tope d’une certaine manière avec Anne Hidalgo. Mais à l’inverse, en lâchant sur le PLUI, la maire de Paris permet à ses riches voisins de ne pas trop se soucier de rééquilibrage urbain.

Le texte va continuer à être discuté entre les protagonistes jusqu’à la date butoir du 7 octobre. Ensuite, tout se jouera à Matignon: le Premier ministre acceptera-t-il cet accord qui ressemble quand même à un démontage en règle de la loi que sa majorité avait construite l’an dernier?

Sibylle VINCENDON