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Pierre Mansat et les Alternatives

Luttes émancipatrices,recherche du forum politico/social pour des alternatives,luttes urbaines #Droit à la Ville", #Paris #GrandParis,enjeux de la métropolisation,accès aux Archives publiques par Pierre Mansat,auteur‼️Ma vie rouge. Meutre au Grand Paris‼️[PUG]Association Josette & Maurice #Audin>bénevole Secours Populaire>Comité Laghouat-France>#Mumia #INTA

Grand Paris. Paris Métropole [II]

Beaubourg présente une remarquable expo "Airs de Paris".                                                                         Un site y est dédié.  http://www.airsdeparis.centrepompidou.fr/index.html

Dans l'un des forums j'ai relevé cette contribution de Jamal Es samri sur la centralité. http://www.airsdeparis.centrepompidou.fr/viewtopic.php?t=224&sid=9d039ede982c877f4823dfade2247934 .

Quelles sont les transformations contemporaines les plus significatives du milieu urbain et de la construction architecturale ? La notion de centralité est aujourd’hui en crise. Et cela pour au moins trois raisons : un phénomène de métropolisation qui rend flou les limites du territoire, la distinction centre /périphérie qui est de moins en moins opératoire et une mobilité généralisée qui fait vaciller le caractère de repère qu’elle occupait jusqu’ici. La centralité On sait que l'espace que forme une ville n'a rien d’homogène. La centralité est une propriété qualitative de l’espace urbain. Le caractère de centralité se fonde sur un ensemble de propriétés, qui peuvent être liées à la géométrie de l'espace, à l'antériorité historique du noyau initial à partir duquel la ville s’est étendue, aux représentations symboliques qui lui sont associées etc. Il est divers centralités : « Centralité du marché qui permet et régule les échanges économiques ; centralité du pouvoir qui contrôle, redistribue, et institue des règles de coexistence entre les groupes sociaux ; centralité des dispositifs qui organisent la division technique et sociale du travail ; centralité, aussi, des lieux de cultes, de loisirs, et plus généralement de tous les services offerts par la ville » . Cette centralité se décline presque à l’infini, ainsi certains quartiers peuvent être le centre de certaines ethnies, certaines communautés qu’on pourra définir comme « centralités minoritaires » (Belzunce, le Marais, la Goutte d’or)… Dans le quartier des Halles, les effets de la centralité se cumulent. Ainsi, d'un point de vue économique, on y trouve le plus grand centre commercial d’Europe qui a remplacé le plus grand marché de Paris ; d'un point de vue politique, l'on se trouve à proximité de l'hôtel de ville de Paris ; d'un point de vue culturel, cultuel pourrait-on dire - la culture n'est-elle pas devenue la religion de nos temps postmodernes ? - le lieu et son environ immédiat, notamment Beaubourg et le Louvre, représente un des pôles culturels les plus importants de la capitale française ; enfin du point de vue des communications, les Halles sont le plus grand nœud du réseau de transport en commun d’Ile-de-France, soit trois lignes de RER, cinq lignes de métro, quatorze lignes de bus…

Mais au-delà du caractère fonctionnel, la centralité urbaine recouvre une dimension symbolique, le centre urbain « est un territoire commun de rencontre où la résidence n’est pas une condition pour se sentir chez soi, peut apparaître comme quelque chose où la vie est continue dans la mesure ou il s’y passe toujours l’un ou l’autre évènement à signification collective… » . Et dans les Halles, quoi qu'on en dise, ce n'est pas la dimension marchande qui domine, mais bien la signification collective. Par exemple, concernant la présence de la jeunesse issue de la banlieue francilienne dans le lieu, à la si mauvaise réputation médiatique, elle correspond à un « désir de visibilité sociale ». Ainsi l’investissement de ces espaces centraux correspond à une stratégie de « visibilisation » et d'attraction des regards . Où présence et formes de théâtralisation (parfois violente) qu'elle implique sont considérées comme socialement problématiques. Cette jeunesse est tout à la fois en quête de l'image de la ville avec ses lumières et ses vitrines, plus que de la ville elle-même, et d’un lieu d’inscription, d’ou le « marquage » de l'espace. Manières de faire problématique qui ne sont finalement qu’une tentative malheureuse de recomposition d'un territoire fragmenté.

La métropolisation Les villes d’Amérique du nord et de l’Europe de l’ouest sont aujourd’hui soumises à un phénomène de « métropolisation ». En quoi consiste-t-il ? « La métropolisation, affirme François Ascher, est la dynamique qui concentre de façon croissante les hommes, les activités et les richesses dans des agglomérations de plusieurs centaines de milliers d'habitants, multifonctionnelles, fortement intégrées dans l'économie internationale. Elle s'accompagne de transformations significatives des grandes villes, de leurs banlieues et leur environnement, constituant des espaces urbanisés de plus en plus vastes, hétérogènes, discontinus, formés parfois de plusieurs grandes cités, de moins en moins liées à une économie régionale, et dont les arrière-pays se transforment en espaces de services de loisirs. » Ce processus prendra des manifestations diverses : d’un point de vue économique, les villes deviennent, chacune à leur niveau, support de la mondialisation et de ses activités (« financiarisation » et « tertiarisation» croissantes des activités économiques…), qui seront concentrées dans un espace circonscrit (Central Business District) ; d’un point de vue géographique, on assiste à l’étirement ( morphologie discontinue, en peau de léopard…), à la fragmentation et à la hiérarchisation des territoires qu’elles recouvrent ; d’un point de vie social, la ségrégation sociale et la logique de l’ « entre soi » seront accentuées etc. Ce changement d’échelle (aire d’influence) et de « nature » des agglomérations urbaines imposent une recomposition et une réarticulation des espaces centraux et périphériques. A l’évidence la métropolisation « produit » de nouveaux types d’espace, tandis que les plus anciens sont recomposés. Ces nouveaux centres sont de divers types et peuvent drainer des populations considérables, ces populations peuvent être diverses ou spécifiques. A Paris, il est de multiple figures de la centralité : la centralité politique (l’Elysée, Matignon, Palais Bourbon…) se situe dans le faubourg Saint-Germain, là ou demeurait la Grande aristocratie sous l’ancien régime ; la centralité économique (banque, pôle de finance, sièges sociaux des grandes entreprises) qui historiquement se trouvait dans le 9ème arrondissement et qu’aujourd’hui on situe dans les 8ème et 16ème arrondissements, ainsi qu’à La Défense ; la centralité culturelle se subdivise en différents pôles : le commerce d’art se situe autour de l’école de Beaux-Arts et de l’avenue Matignon, les cinémas se répartissent autour et sur les Champs-Élysées…Par exemple, les Halles ne sont ni un centre décisionnel (centre d’affaire), même si la volonté exista dans les années 70 de transformer le lieu dans ce sens ; ni un centre ancien rénové, muséifié, fétichisé bénéficiant d’une « griffe spatiale » convoitée, car mis à part l’église Saint Eustache, la fontaine des Innocents et la mémoire des habitants, il n’y reste aucune trace d’Histoire. Elles ne sont pas plus une centralité de périphérie créée par les forces centrifuges et la suburbanisation (autour de grands centres commerciaux), même si les usagers des lieux et la logique des flux de leurs usagers tendent à les y apparenter.

Les Halles, par contre, réalisent la synthèse, sur la rive gauche du centre historique, de la distinction « centre de mouvement » / « centre de figure » établie par Samuel Bordreuil. Distinction où le centre de mouvement répond au principe de « centralité d’attraction » fondée sur la mobilité et l’accessibilité et où le centre de figure correspond à un principe de « représentation » et de « régulation », qui permet à une société d’être visible à elle-même. Les Halles sont une synthèse de ces deux catégories : un centre de figure en mouvement. C’est le mouvement lui même qui s’y trouve représenté, mis en scène. Aussi ce lieu de passage incontournable des franciliens (3,1 millions de pendulaires…) est, paradoxalement, tout à l’inverse de Beaubourg, le centre de la Région parisienne sans être perçu comme un centre pour les parisiens, eux-mêmes.

Le rapport centre/périphérie

Si le rapport entre Paris et sa banlieue est complexe, puisqu’il mêle une rupture profonde à une continuité réelle, le clivage y prédomine cependant. Il est morphologique et le produit de l’histoire. Paris connut plusieurs enceintes fortifiées (celle de Philippe Auguste, celle de Charles V, celle de Louis XIII, le mur des Fermiers Généraux et les fortifications de Thiers) que dessinent encore ses boulevards. La plus récente, celle des fortifications de Thiers, marque encore une frontière à la fois dans l’espace et dans le droit administratif, puisqu’elle coupe Paris de sa banlieue. Par ailleurs, les fortifications de Thiers sont redoublées par la construction (de 1963 à 1973) du boulevard périphérique - véritable autoroute urbaine - qui génère coupure visuelle et sonore. Mais on ne peut pas comprendre la ville sans replacer la ville dans son contexte régional. Le Paris réel (au sens géographique, social et économique) va bien au delà du Paris intra-muros. Soit, schématiquement, le territoire qui est desservi par les quatre premières zones de la « carte orange ». Cinq millions d’habitants y habitent. En 1964, sous l’égide de Charles de Gaulle, la région parisienne fut réorganisée. On supprima le département de la Seine et de la seine-et-Oise. Et on créa huit départements en Île-de-France : Hauts-de-Seine, Seine-Saint-denis, Val-de-Marne, Yvelines, Essonne, Val-d’Oise, Seine-et-Marne et Paris qui devint une-ville département. Le déséquilibre entre Paris et sa banlieue, voire, entre Paris et reste de la France est manifeste : Paris, 1 % du territoire régional, 19,4 % de sa population, 32 % de ses emplois, 10 % du PIB Français. Mais il s’exprime aussi par de profondes inégalités : la desserte par les transports en commun, la densité et la localisation des équipements et services publics, l’accès à l’éducation et à la formation, la qualité de l’habitat et du cadre de vie… Ce déséquilibre, cette polarisation du Paris intra muros a bien entendu un effet d’attracteurs des populations banlieusardes. Les Halles, où percole 40 millions de visiteurs par an, dont une bonne partie sont des banlieusards précisément, en sont une des portes d’entrée principale.

Si, à l’évidence, en région parisienne, le centre domine la périphérie, dialectique oblige, la périphérie peut à son tour dominer certaines parties du Paris central. Ainsi « l’ancien quartier des Halles est devenu un morceau de banlieue dans Paris intra muros, un bras de la périphérie branché sur son centre » . Inversion, quelque peu carnavalesque, d’un ordre immémorial, où la périphérie occupait le second rôle. Mais plus probablement, il s’agit là plutôt d’une structure en « chiasme », puisque Paris se prolonge en banlieue de multiple façons : le logement social, les espaces sportifs, les stations d’épuration, les cimetières et même les marchés - l’ancien marché des Halles n’a-t-il pas été déménagé à Rungis ? - ; tandis que « l’espace minéral underground » (Baudrillard) que sont le Forum des Halles est un fragment de périphérie au centre ville. Quoi qu’il en soit, l’usage des Halles qui est fait aujourd’hui semble être, dans une certaine mesure, un juste retour des choses.

Concernant le rapport complexe qu’entretient Paris à sa banlieue, le cas des Halles n’est d’ailleurs pas un exception puisque : « chaque jour la banlieue entre à Paris, y construit la ville diurne, et en sort le soir venu, déconstruisant la capitale pour créer cette autre ville, nocturne, où les espaces prennent un autre sens, ou les immeubles haussmanniens des boulevards et leurs bureaux se vident… » . L’effet tunnel : les paradoxes de la mobilité La mobilité généralisée que permettent les modes de transport rapide a de multiples conséquences (dilatation et discontinuité de l’espace…) . Aussi le schéma « christallerien », organisation urbaine pyramidale, qui jusqu’ici permettait de rendre compte, avec une certaine pertinence, de la répartition spatiale, est rendu obsolète. Un autre principe d’organisation va le remplacer : il s’agit du système des « hubs and spoke » (littéralement des moyeux et des rayons). Ce système se fonde sur les réseaux liés à l’essor des transports rapides, qui, on le sait, provoque de nouvelles organisations et hiérarchies urbaines. Ainsi la rapidité suppose la réduction du nombre d’arrêts, ce qui produit, ce qu’on appelle « un effet tunnel », et rend performantes la concentration et la dispersion des flux à partir de plates-formes appelées hubs. Ce type d’organisation en réseau concerne non seulement le transport aérien, mais aussi les transports routiers et ferrés de marchandises, avec la constitution de plates-formes logistiques multimodales localisées près de nœud de communication, ou encore les transports urbains et interurbains des personnes en polarisant toutes sortes d’activités à proximité des gares multimodales et des échangeurs routiers périurbains. Les hiérarchies et les maillages urbains (tant internes qu’externes) sont ainsi modifiés durablement.

Ainsi, les Halles, en tant que hubs de l’hypercentre de Paris, met à jour un paradoxe : aujourd’hui on peut entrer dans la ville par son centre. L’exemple des Halles montre que les villes d’aujourd’hui ne relève pas d’une « géométrie » cartésienne, classique, spatialisée. A l’âge de la mobilité généralisée, les territoires de la ville ne sont plus aréolaires, mais réticulaires . Le réseau c’est substitué aux enceintes, la carte orange à l’octroi. Ainsi « les courbes isochrones et les zones de tarification se substituent au vieux dessins des limites urbaines » . Qu’une ville ait sa « porte » en son centre, comme les Halles d’aujourd’hui le montrent, voila bien un des paradoxes que permet « l’effet tunnel ». Serait-ce là une victoire du temps sur l’espace ?

2. Quels sont les outils d’analyse, les concepts, les œuvres ou les techniques qui vous paraissent le mieux en tenir compte à l’heure actuelle ? Pour rendre compte du caractère non cartésien, non euclidien et tout en épaisseur du territoire, un concept s’impose, celui d’espace social cher à Henri Lefebvre : « L’espace social et surtout l’espace urbain apparaissent dés maintenant dans leur multiplicité, comparable à celle d’un « feuilleté » bien plus qu’à l’homogénéité-isotropie d’un espace mathématique classique (euclidien-cartésien). Les espaces sociaux se compénètrent et se superposent. Ce ne sont pas des choses limitées les unes par les autres, se heurtant par leur contour ou par le résultat des inerties.... » (H. Lefebvre, La Production de l’espace, Anthropos, 1974, Paris, p.104). Pour rendre compte du mouvement « perpétuel » et immanent de la recomposition (territorialisation et déterritorialisation) de la centralité et pour pouvoir expliquer l’ « événement », qui n’a de cesse de s’inviter dans les problématiques urbaines, les notions plus biologiques de flux et de rhizome sont d’un grand secours : « de la couche centrale à la périphérie, puis du nouveaux centre à la nouvelle périphérie, passent des ondes nomades ou des flux de déterritorialisation qui retombent sur l’ancien centre et s’élancent vers le nouveau » (G. Deleuze et F. Guattari, Mille Plateaux, p. 70).

Jamal Es samri

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