26 Mars 2009
[ 25/03/09 ]
Nicolas Sarkozy présentera le 29 avril l'un de ses chantiers les plus importants, le projet du Grand Paris. Particulièrement ambitieux, il doit faire de la région capitale l'atout maître de la France dans la compétition économique mondiale des trente prochaines années. Paris est en effet, avec Londres, New York et Tokyo, l'une des quatre seules « villes monde » recensées par l'OCDE pour leur capacité à concentrer richesses, recherche et innovation. Ces futures locomotives de l'économie mondiale se caractérisent aussi par leur art de vivre et une croissance économique supérieure à celle de leur environnement. Ainsi, Paris et l'Ile-de-France représentent 30 % du PIB national avec 18 % de la population. « Cela signifie qu'une croissance de 5 % en Ile-de-France peut soutenir une croissance nationale de 3 % », expliquait l'un des acteurs du Grand Paris à la veille de la crise. Objectif que le Conseil régional d'Ile-de-France juge inaccessible : depuis des années, les avantages de la région en termes de croissance, d'emploi et de niveau de vie se rapprochent de la moyenne nationale. Ce constat est aussi celui des Verts, alliés du président socialiste du conseil régional, Jean-Paul Huchon, qui prônent un développement qualitatif plutôt que quantitatif. Le projet de schéma directeur préparé par la région, lui aussi pour les trente prochaines années, se fonde donc sur une croissance de l'ordre de 2 %. Jugée insuffisante par l'Etat, elle vaut plusieurs remarques à la région, mais Jean-Paul Huchon maintient le cap.
C'est compter sans l'élection de Nicolas Sarkozy. Pour avoir été en charge de l'Aménagement du territoire et élu d'Ile-de-France, il connaît le potentiel de la région et en fait la pierre angulaire de sa politique de croissance. Aussi lance-t-il, dès le 26 juin 2007, son projet de Grand Paris. Un bras de fer s'engage avec Jean-Paul Huchon conforté par Bertrand Delanoë. Le maire socialiste de Paris craint que le projet présidentiel rogne son pouvoir. Nicolas Sarkozy maintient la pression et lance, le 17 septembre, une grande consultation d'architectes pour nourrir son idée. Habile, Bertrand Delanoë apporte 400.000 euros à l'opération, sûr que les architectes, farouchement indépendants, seront le meilleur rempart à d'éventuelles visées hégémoniques de l'Elysée. Sans marge de manoeuvre, Jean-Paul Huchon campe sur ses positions jusqu'à pousser Nicolas Sarkozy à reprendre le dossier en main il y a un an en nommant Christian Blanc, secrétaire d'Etat chargé du Développement de la région capitale.
A lui d'adapter à l'Ile-de-France les recettes qui marchent à Londres et New York. En s'appuyant sur les travaux des architectes, il doit maintenir la cohésion économique et sociale de la région et préparer des pôles de développement économique associant environnement, enseignement, recherche et entreprises. Reliés par un système de transport collectif performant, leur mise en réseau doit alimenter la croissance, puis dans un deuxième temps entraîner celle de métropoles comme Lille, Strasbourg, Lyon... Ce n'est qu'une fois ces projets bouclés - il y intègre actuellement les conclusions des architectes - qu'il devra formuler des propositions sur la gouvernance de la région. Christian Blanc pourra alors s'appuyer sur le syndicat d'études Paris Métropole lancé par Bertrand Delanoë pour écouter les élus d'Ile-de-France, très remontés par les conclusions du comité Balladur.
Contourné, Jean-Paul Huchon, qui n'a pas pu ou n'a pas voulu attendre les projets de Christian Blanc pour faire voter le schéma directeur de la région, devra accepter de revoir sa copie. « Il sait que ses élus auxquels Christian Blanc a présenté des projets qui les intéressent risquent de le lâcher », dit quelqu'un qui le connaît bien. Pire, son principal argument, « l'Etat ne peut rien faire sans le financement de la région et des départements », s'émousse avec la crise. Les investisseurs favorisent les projets de long terme sans risque et Christian Blanc leur en propose. Enfin, à trop résister, Jean-Paul Huchon risquerait de compromettre ses chances d'investiture pour les régionales de 2010. Certains dans l'entourage de Martine Aubry, dont il se réclame, sont tentés par les projets de Christian Blanc et, en face, l'UMP vient de faire le choix, avec Valérie Pécresse, de la rupture.