24 Août 2019
Dans cet article Daniel Behar et Philippe Estèbe [ACADIE] démolissent les idées toutes faites et simplistes sur les effets possibles du Grand Paris Express.
Extraits...
[....Comment le métro automatique continuera-t-il à influencer l’évolution de la métropole ? Quels seront les autres facteurs (évolution des technologies, variation du prix de l’essence, transformation des modes de vie) venant rouvrir le jeu ? Quelles seront les nouvelles contradictions susceptibles d’émerger ?
À cette échelle de temps, il est impossible d’établir les tendances qui seront à l’œuvre sur cette période autrement que sous la forme de conjectures destinées seulement à provoquer la réflexion. Le temps du renouvellement reste largement ouvert, et dépendra de la façon dont les dynamiques évoquées dans les deux séquences précédentes auront été prises en compte (et infléchies) par les différentes parties prenantes de la ville GPE. A ce stade, il n'est pas question d’écrire le scénario de cette séquence lointaine. Il s’agit surtout de souligner que la finalisation du Grand Paris Express ne constitue pas la fin de l’histoire.
A cette échéance, les effets du Grand Paris Express seront surtout déterminés par l’arrivée d’une nouvelle génération d'acteurs. Les formes du renouvellement sont multiples et découlent des épisodes précédents : renouvellement urbain face au phénomène d’obsolescence, renouvellement générationnel avec l'arrivée à l’âge adulte des enfants des séquences précédentes, renouvellement institutionnel avec d’autres réformes territoriales.
Les acteurs centraux des séquences précédentes ne se retrouveront plus forcément à l’affiche, qu’il s’agisse des ménages, des entreprises ou des acteurs publics. Les actifs seront partis en retraite (ailleurs en France?) laissant la place à leurs enfants, les entreprises auront été rachetées ou seront devenues des multinationales, les élus auront passé la main, les bailleurs auront fusionnés puis auront revendu une partie de leur patrimoine, etc.
Un tel changement de génération sera susceptible de réouvrir le jeu. Il sera porteur d’opportunités inédites et suscite des contradictions nouvelles. Par exemple, la logique de « gains de temps » qui structurait le temps de la mise en accessibilité perdra de son importance. De fait, ces acteurs individuels ou collectifs n’auront pas connu la région parisienne antérieure au Grand Paris Express....].
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Un effet territorial global: vers un nouvel âge de la métropolisation?
Parce qu'il bouscule la carte de l'Ile de France, et en propose une représentation à la fois plus intégrée, plus compacte et plus homogène autour de l'offre de transports, le Grand Paris Express pourrait paraitre en capacité de faire tabula rasa des tendances à l'œuvre au travers de la métropolisation. On entend par là, sur le plan géographique le processus qui en donnant la prééminence aux liens sur les lieux, accroît toujours davantage les interdépendances entre les territoires, tout en disloquant les ordonnancements historiques.
Le futur métro permettrait de réactiver une grille de lecture et des repères éprouvés avec ce que cela porte "d'espoirs" (le polycentrisme) et "d'épouvantails" (l'éviction sociale du centre vers la périphérie).
Portant, au vu des analyses esquissées précédemment, l'hypothèse la plus probable serait plutôt celle d'effets territoriaux qui s’insèrent dans la dynamique de métropolisation et qui viennent en accentuer les caractéristiques. Cette hypothèse est ici argumentée sur trois plans: la géographie structurelle de la région capitale, son organisation fonctionnelle et enfin sa géographie sociale.