26 Juillet 2013
Jacques Marsaud, Directeur général de services de Plaine Commune
Une gouvernance du « Grand Paris » est une nécessité pour assurer un développement plus équilibré, solidaire, durable de la métropole.
Le projet de loi gouvernemental soumis au Sénat en première lecture en juin dernier constituait une avancée intéressante en ce sens, en s’inscrivant dans la continuité du processus initié par Paris Métropole, et en se nourrissant des dynamiques territoriales existantes ou en émergence avec les communautés d’agglomération et les contrats de développement territorial.
Après son rejet par une majorité de circonstance que seule une vision étroite et dépassée de l’autonomie communale réunissait, un nouveau projet s’inspirant du rapport Balladur a été déposé sur le bureau de l’Assemblée nationale, sans information ni consultation des élus concernés, et adopté en toute hâte par une majorité de députés.
En rupture avec le projet précédent qui s’inscrivait dans un processus démocratique et ascendant, le dispositif proposé se révèle inadapté, inefficace et impraticable.
Il est inadapté parce que le périmètre proposé ne correspond pas à l’aire métropolitaine, en excluant par exemple les villes nouvelles ou l’aéroport de Roissy. Il rejette dans une nouvelle banlieue toute une partie de l’aire urbaine qui fait le Grand Paris.
Il est inefficace, et même dangereux, car il crée un monstre bureaucratique et technocratique « gouvernant » six à huit millions d’habitants, avec un centre de décision stratégique coupé des réalités et des dynamiques territoriales. Il correspond à un mouvement de recentralisation sans précédent alors que l’on sait que l’efficacité appelle la décentralisation et la proximité. Il substituera aux dynamiques de projets territoriaux une gouvernance fondée sur des logiques technocratiques et des accords partisans.
Il est enfin impraticable. En supprimant les communautés d’agglomération qui rassemblent aujourd’hui plus de 70% de la population métropolitaine et en faisant remonter leurs engagements, leurs compétences et leurs personnels au niveau de la métropole, il appelle la mise en place de mécanismes de transferts d’une lourdeur et d’une complexité extrêmes. Imaginons seulement un instant ce que deviendront les flux financiers entre les villes et leur EPCI (AC et DSC), les outils communautaires (SEM, SPL, OPAC…), les engagements juridiques et financiers (conventions de concession, PLH, CDT, marchés, dette…), les agents !
Le texte doit être amendé - En instituant des conseils de territoire sans pouvoirs ni moyens propres, à qui seront subdéléguées par la métropole la gestion de certains services et la mise en œuvre de certaines actions, il mettra en responsabilité des élus ne disposant pas de moyens de les assumer.
S’il faut une gouvernance au Grand Paris, elle ne peut être celle-là. Le projet ne peut rester en l’état. Il doit donc être amendé puisqu’heureusement, il est amendable :
Un tel dispositif, qui nécessite certes quelques amendements significatifs, permet d’assurer un juste équilibre entre exercice des compétences stratégiques qu’appelle une gouvernance métropolitaine, et gestion et dynamique de projets qu’appellent la réalité et la diversité des territoires.
Il se construit dans un processus ascendant, démocratique, et évite l’imbroglio administratif et juridique qui découlerait d’abord d’une centralisation des compétences et des moyens puis d’une délégation à des structures déconcentrées sans pouvoir réel de décision.
Les solutions juridiques existent. Elles résident dans l’adaptation par la loi des institutions existantes, qu’elles s’appellent EPCI ou pôle métropolitain. S’il n’y avait qu’un amendement à proposer, ce serait alors de doter les conseils de territoire de la personnalité juridique et de moyens propres. Les ordonnances prévues par la loi, la raison et le principe de réalité feront le reste.
Si Paris valait bien une messe, le Grand Paris mérite bien un peu d’imagination, d’innovation et de spécificité juridique