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Après deux ans d’une attention soutenue au sommet de l’État, le Grand Paris semble avoir disparu de la carte politique nationale. Il n’y a plus de ministère ad hoc et, après une consultation internationale et une loi d’urbanisme, la métropole parisienne est largement épargnée par la réforme des collectivités. La refonte en profondeur de l’architecture institutionnelle opérée à cette occasion a même conforté le régime d’exception de l’agglomération parisienne.
Aujourd’hui plus que jamais, il appartient aux élus locaux d’être les acteurs d’une nouvelle étape de la construction politique de la métropole. Et il est de la responsabilité de Paris, fondatrice de la conférence métropolitaine et au cœur de la dynamique métropolitaine depuis 2001, d’identifier les voies et les moyens de ce futur politique.
Pour prolonger l’impulsion lancée il y a dix ans maintenant par le maire de Paris Bertrand Delanoë, et au nom d’une triple exigence, il est urgent de poser la question de la gouvernance.
Une exigence démocratique : il n’est plus concevable que des décisions lourdes de conséquence pour les citoyens soient prises dans des instances – syndicats techniques, entreprises - qui échappent à leur contrôle.
Une exigence d’efficacité : refuser de poser la question du gouvernement de la métropole est le plus sûr moyen de s’interdire de mener des politiques à l’échelle des problèmes posés.
Une exigence d’équité : ne pas faire émerger un ensemble politique légitime et cohérent, c’est avaliser la dynamique de morcellement à l’œuvre dans la métropole. Ne pas construire des liens entre les acteurs de la métropole, c’est accepter une hiérarchie des lieux.
C’est dans Paris Métropole [1], qui réunit aujourd’hui tous les élus locaux, que Paris veut ouvrir la discussion.
Quatre ans après l’invention d’une scène politique d’un genre nouveau, la « conférence métropolitaine » [2], Paris Métropole a fait la preuve de la maturité des élus. Avec 170 membres (communes, intercommunalités, départements et la Région), toute la métropole figure désormais dans Paris Métropole. Il revient à tous ces acteurs d’inventer une manière d’agir au nom de l’intérêt de la métropole, de témoigner de leur volonté de ne pas laisser l’avenir se réduire à une juxtaposition de compromis locaux et de négociations boiteuses.
Une étape importante est franchie : nous venons d’accomplir l’alternance. Début novembre, tous les élus étaient réunis à Paris pour désigner le nouveau président de Paris Métropole. Nous avons su créer les conditions pour que la scène politique métropolitaine ne vire pas à l’arène conflictuelle. Aujourd’hui, Paris Métropole s’impose comme la seule instance politique du Grand Paris. Il reste à mettre cette avancée à profit.
La participation des élus métropolitains aux débats publics sur les projets « Arc express » et « Grand 8 » montre la volonté de contribuer à une sortie par le haut de l’impasse actuelle. Les solutions dirigistes sont vouées à l’échec. Elles sont incapables de créer du consensus ou de dépasser la simple superposition d’intérêts locaux. Les conditions sont réunies pour aborder ce débat sans simplisme et transformer réellement la métropole au bénéfice de tous ses habitants.
Le maçon est au pied du mur. Il faut amplifier la capacité des territoires à agir : la dimension collégiale fait la force de Paris Métropole, elle doit être préservée. Restaurer l’arrogance parisienne ou la logique des solutions imposées est inenvisageable. Mais pour ne pas en rester aux incantations, il est aussi nécessaire de s’accorder sur le fait que Paris Métropole n’est pas un aboutissement. Il faut maintenant définir le chemin vers une gouvernance de la métropole.
Pour commencer, changeons d’approche et gardons à l’esprit cette évidence : le métropolitain est un citoyen introuvable. Le débat métropolitain doit aujourd’hui composer avec des « espaces politiques » perçus comme plus légitimes : commune, département, région. Il n’y a pas lieu de rêver une énième refonte institutionnelle ou d’assurer le triomphe de telle ou telle des composantes du système institutionnel métropolitain. Au contraire, consacrons nos efforts à assurer la coordination du système. Mais partons de la volonté des acteurs du territoire pour construire les conditions dans lesquelles les agencements des territoires pourront produire de l’action publique régulatrice. Le premier rendez-vous, c’est donc celui de la construction d’une véritable citoyenneté métropolitaine.
Considérons aussi qu’il est ainsi essentiel de passer du discours de la gouvernance à la gouvernance par les actes. Paris Métropole dispose d’une autorité qui va au-delà des simples compétences d’études que lui confèrent ses statuts. Il faut s’appuyer sur la compétence de fait de Paris Métropole, liée aux 170 membres qui la composent. Ce qui est à inventer, ce sont des procédures simples de "saisissement", des chantiers légers de construction de référentiels partagés, des rendez-vous originaux et emblématiques du "on fait ensemble".
Paris Métropole doit acquérir de vraies compétences. Il ne s’agit pas d’ajouter une couche institutionnelle, mais d’arriver à produire de la décision. Il ne s’agit pas non plus d’agir selon un format unique, mais de manière variable en fonction des sujets. Paris Métropole doit devenir le lieu de proposition et d’action qui entreprend et développe des instruments de solidarité financière, qui suscite des projets métropolitains.
Les 110 initiatives pour la métropole, lancées en avril 2010 [3] sont un premier exemple de cette manière de faire. Elles marquent la volonté de partir des initiatives locales, de rechercher la participation des citoyens, et d’identifier l’intérêt métropolitain. Elles seront mises en débat le 10 décembre 2010. La révision en cours des mécanismes de solidarité entre communes d’Île-de-France constitue une autre opportunité. Cette révision a été rendue nécessaire par la suppression de la taxe professionnelle. Bertrand Delanoë souhaite en faire bien plus qu’une « réforme paramétrique », visant à corriger marginalement les différentiels de revenus ou de potentiels fiscaux. C’est une opportunité unique de réinventer la péréquation horizontale au sein de la métropole. Au-delà, c’est l’occasion de créer un véritable fonds d’investissement métropolitain, gouverné par les élus de la métropole et susceptible d’intervenir en appui des initiatives « d’intérêt métropolitain ».