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Pierre Mansat et les Alternatives

Luttes émancipatrices,recherche du forum politico/social pour des alternatives,luttes urbaines #Droit à la Ville", #Paris #GrandParis,enjeux de la métropolisation,accès aux Archives publiques par Pierre Mansat,auteur‼️Ma vie rouge. Meutre au Grand Paris‼️[PUG]Association Josette & Maurice #Audin>bénevole Secours Populaire>Comité Laghouat-France>#Mumia #INTA

> Observations sur le Grand Huit de Christian Blanc, par Jean Vivier

Point de vue Observations sur le Grand Huit de Christian Blanc, par Jean Vivier LEMONDE.FR | 03.06.10 | 09h11 • Mis à jour le 03.06.10 | 09h27 e Grand Huit est fondé sur un discours fumeux qui fait l'impasse sur le trafic attendu. "Le Grand Paris, c'est un ensemble systémique. C'est un rhizome vivant qui établit des connexions et tisse des liens entre des pousses qui s'enrichissent les unes les autres et essaiment à leur tour" (Le Grand Paris du XXIe siècle, Christian Blanc, p. 155). Le Grand Huit censé relier les "clusters" à Paris et les relier entre eux ne fait l'objet d'aucune prévision de trafic officielle au prétexte que ces prévisions seraient incertaines et que l'infrastructure engendrerait toujours le trafic qu'elle est capable de transporter. C'est évidemment faux, l'expérience a montré que les prévisions sont le plus souvent fiables et qu'il existe des lignes très sous-utilisées, comme les tangentielles SNCF qui parcourent des zones peu denses comme celles que desserviraient une bonne partie du Grand Huit. La densité est en effet la grande absente de la réflexion de Christian Blanc. Pourtant, il est bien connu que la fréquentation d'une ligne varie en raison directe de la densité de population et d'emplois desservis à distance de marche des stations. En outre, comment peut-on affirmer desservir des "clusters" aussi étendus que la moitié de Paris intra-muros avec trois ou quatre stations ? Il manque au projet de Christian Blanc tout le volet transport public interne des pôles par des tramways et des autobus. Tout cela n'est pas gratuit. Le Grand Huit ne répond pas aux besoins de transport des franciliens. Sur 130 km, seulement 40 km sont assurés d'attirer un trafic élevé en rapport avec le mode métro proposé, mais seulement si les stations sont suffisamment rapprochées (distance interstation de l'ordre de 1 km, au lieu des 3 km prévus par Christian Blanc) : l'extension de la ligne 14 vers la branche Saint-Denis de la ligne 13 et la rocade Saint-Denis–La Défense–Boulogne–Villejuif, proche de la partie ouest d'Arc express, le projet de rocade métro défendu par la région. Le reste du Grand Huit (soit 90 km) relève d'un autre mode que le métro, sauf urbanisation massive le long de la ligne. Pour justifier le métro il faudrait que s'ajoute environ un million de "P plus E" (population plus emplois) à l'urbanisation existante dans un rayon d'un km autour des stations. A l'inverse, Arc express est assuré d'avoir un trafic élevé et une excellente rentabilité socio-économique, s'il dessert les banlieues denses de la première couronne (ce qui n'est pas tout à fait le cas du projet Orbival – section sud-est d'Arc express – dans son état actuel). Les nombreuses études disponibles le prouvent. En l'absence de prévisions de trafic, comment Christian Blanc peut-il affirmer que le Grand Huit soulagera le cœur du réseau ferré francilien ? Si cette affirmation est démontrée pour Arc express, elle est certainement fausse pour les sections de rocade du Grand Huit éloignées de Paris car les liaisons de banlieue à banlieue en grande couronne se font en voiture et ne contribuent donc pas à la saturation du réseau de transport public. Le choix du métro est inadapté à la majeure partie du Grand Huit. Le choix du mode ne peut faire abstraction de son coût rapporté au service rendu. Le métro est le mode le plus efficace (en termes de coût pour la collectivité intégrant la valeur du temps de transport) si la densité desservie est supérieure à 120 "P plus E" par hectare. Chaque mode a son domaine de pertinence et pour les déplacements en rocade sur le plateau de Saclay ou entre la cité Descartes et Roissy - Villepinte, c'est l'automobile qui s'impose (électrique à terme) avec bien sûr un service de bus pour les non-motorisés. Le Grand Huit ne peut pas concurrencer l'automobile sur les liaisons domicile – travail en rocade de grande couronne. Il n'aura pas plus de succès à cet égard que les tangentielles SNCF. En effet, si le rabattement sur une station en voiture près du domicile est aisé, la diffusion à l'arrivée au pôle restera tributaire de services de bus dissuasifs, sauf pour les quelques entreprises situées à distance de marche de la station. Proposer un métro sur ces itinéraires, c'est gaspiller l'argent public. En outre, sur le plan technique, le métro est mal adapté aux interstations longues. L'objectif économique qui sous-tend le projet de Christian Blanc est improbable. Le Grand Huit permettrait de créer 800 000 à 1 million d'emplois sur quinze ans selon Christian Blanc. L'expérience montre que la création d'emplois ne dépend que très marginalement de la réalisation d'infrastructures. En outre un tel rythme d'accroissement (55 000 par an) marquerait une rupture complète avec le passé et supposerait une arrivée massive d'immigrants qualifiés (car on peut supposer que ce n'est pas l'ouverture des frontières aux pauvres du tiers-monde qui est visée). De toute façon ce ne sont pas les quelques "clusters" sélectionnés par Christian Blanc qui assureront à eux seuls l'essor économique de la région. Celui-ci résultera plutôt d'une action (pas seulement dans le domaine des transports publics) en faveur de tous les pôles d'emplois existants et de leur bonne intégration à la ville dans une optique de mixité population-emplois. La liaison des "clusters" entre eux n'a aucun intérêt. Les déplacements du travail entre pôles représentent moins de 5 % du trafic d'une rocade. Quelle logique peut sous-tendre la nécessité de relier le "cluster biotech" à la cité Descartes et celle-ci à son "terrain d'exercice", les cités dortoirs de Clichy - Montfermeil, si ce n'est celle d'un discours naïf ou quelque peu démagogique. C'est la liaison rapide vers Paris qui importe pour favoriser le succès d'un pôle en grande couronne. Concernant la "Silicon Valley" du plateau de Saclay, il faut rappeler que la Silicon Valley californienne s'étend sur un territoire vaste comme la moitié de l'Ile-de-France urbanisée. C'est plus un ensemble d'entreprises du même type dispersé sur un espace très étendu qu'une zone géographique proprement dite. A l'heure de l'Internet à haut débit, le regroupement géographique n'a d'ailleurs que peu d'intérêt. Sous son apparence de modernité, le Grand Huit est un projet ringard. C'est une nouvelle mouture du "ring" proposé par la DREIF il y a quinze ans et qui, à l'époque, avait été écarté au profit d'Orbitale, rocade métro de proche banlieue proposée par l'IAURIF (Institut d'aménagement et d'urbanisme de la région Ile-de-France). Le Grand Huit encourage l'étalement urbain. Alors que la plupart des métropoles européennes ont choisi la compacité comme modèle de développement, Christian Blanc propose l'extension, focalisée certes autour de pôles, mais la rocade inter-pôles ne manquerait pas d'induire une urbanisation étale (du type de celle de la grande couronne) le long de la ligne. Il est en effet vraisemblable que les communes traversées entre les pôles seront nombreuses à réclamer une station (ce qui augmenterait un peu plus l'addition). Le Grand Huit encouragerait l'étalement urbain et l'usage accru de l'automobile et ceci d'autant plus que les habitants de la proche couronne dense, de plus en plus encombrée et polluée, seraient tentés de déménager dans les nouveaux secteurs peu denses en développement. A l'inverse, Arc express, en proche couronne, favorise la compacité en réduisant la congestion et la pollution et en aidant à la transformation des friches industrielles proches de Paris en zones denses où emplois et population sont mêlés. Le Grand Huit accentue le déséquilibre est-ouest de la région en insistant sur la liaison Saclay – Versailles – La Défense – Roissy, le barreau est (alibi pour le grand barreau ouest ?), tellement irréaliste, étant voué à l'abandon. Il est invraisemblable que le vaste secteur de Seine Amont, au sud-est de Paris Seine Rive Gauche sur les communes d'Ivry et Vitry, soit laissé à une reconversion sans ambition alors que ce secteur bénéficie d'une situation exceptionnelle et pourrait être desservi par Arc express et le prolongement de la ligne 10 du métro. Le financement proposé pour le Grand Huit est irréaliste. Le Grand Huit est très cher : 21 milliards d'euros, selon son concepteur. Prétendre que la récupération des plus-values permettrait de financer en grande partie le Grand Huit est une absurdité. La puissance publique ne possède pas les terrains proches des stations. Il n'y a pas eu d'anticipation foncière et on voit mal comment il pourrait y avoir captation de la plus-value. Il paraît aussi délicat de dessaisir les maires de leurs prérogatives en matière d'aménagement et difficile d'imaginer qu'ils envisagent de bon gré de bouleverser l'équilibre de leurs communes en en doublant la densité. En outre, il est bien établi que la taxation des plus-values dans la zone d'influence de la ligne est une ressource mineure et très aléatoire. Cette remarque vaut aussi, bien sûr, pour Arc express (dont le coût est tout de même trois fois inférieur). En période de forte contrainte sur les budgets publics, la nécessaire relance de l'investissement en transport public de masse nécessitera probablement l'affectation de surtaxes assises sur des taxes existantes de montants élevés et stables, surtaxes appliquées dans toute la zone desservie par le transport public ferré. A défaut d'instaurer un péage urbain, les automobilistes pourraient être mis aussi à contribution par le relèvement des amendes de stationnement. Enfin, il ne faut pas qu'une éventuelle réforme tarifaire conduise à réduire les recettes versées par les voyageurs. A cet égard, il faut rappeler que le niveau des tarifs pratiqués en Ile-de-France se situe dans la moyenne des grandes villes des pays développés. Conclusion. Le Grand Huit ne répond pas à une logique d'amélioration des conditions de déplacements. Il témoigne d'une vision dépassée des conditions de la croissance économique et d'un parti pris d'aménagement du territoire contraire à l'objectif écologique de mettre fin à l'étalement urbain. Son mode de financement, fondé principalement sur la récupération des plus-values, est irréaliste. La capacité de financement de nouvelles infrastructures de transport public en Ile-de-France a été sous-utilisée depuis plus de dix ans. Cela dit, elle n'est pas illimitée et des priorités devront être définies. Le Grand Huit n'est pas compatible financièrement avec Arc express et les autres investissements urgents (extensions de la ligne 14 au nord-ouest et du RER E à la Défense, renouvellement du matériel roulant…). En outre, l'augmentation des charges d'exploitation que le Grand Huit générerait serait mieux utilisée si elle servait à renforcer le service aux heures dites "creuses" pendant lesquelles les voyageurs sont souvent aussi entassés qu'aux heures de pointe. Jean Vivier est retraité de la RATP, ancien directeur des services d'études et conseiller scientifique de l'Union internationale des transports publics.

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