24 Février 2008
Un article de l'Humanité
« Le Grand Paris doit regrouper Paris et les trois départements limitrophes (les Hauts-de-Seine, la Seine-Saint-Denis et le Val-de-Marne) et être une collectivité territoriale de plein exercice », déclare, très volontariste et sans ambages, Philippe Dallier, sénateur (UMP) rapporteur de la commission du Sénat sur la gouvernance de l’Île-de-France, lors d’un point de presse du mardi 19 février. Philippe Dallier veut aller vite et très loin dans la remise en question tant de l’organisation des territoires que de la répartition des compétences. Il part d’un constat que beaucoup font, à droite comme à gauche : la région la plus riche de France et d’Europe, l’Île-de-France, connaît d’importantes ségrégations territoriales. Il ne s’attarde pas sur les causes politiques de cette réalité qui touche les territoires les plus populaires. Et pour cause. Cette inégalité de développement montre que ce n’est pas une question d’organisation territoriale mais de choix (donc de responsabilités) politiques. Il préconise un « Grand Paris » qui s’occuperait des politiques sociales (que les communes, aux compétences réduites, seraient chargées ensuite de mettre en oeuvre), du logement, du développement économique, du transport (en lien avec la région), voire de la création d’une police métropolitaine. Avec, pour financer le tout, une taxe professionnelle unique…, fermez le ban ! Cette nouvelle collectivité territoriale conduirait à la disparition des départements de la première couronne ainsi que de toutes les intercommunalités. Elle serait, selon Philippe Dallier, administrée par une équipe élue au suffrage universel. Et même, à l’instar de Londres (où, soit dit en passant, les inégalités sociales sont loin d’avoir disparu), élire au suffrage direct un « maire » - un vrai petit président, en quelque sorte. Quand on voit les dérives du régime présidentiel au plan national, une telle idée ne rassure pas vraiment.
Dans cette conception pour le moins très centralisatrice de l’organisation territoriale et, en fin de compte, du pouvoir, naturellement toujours au nom de l’efficacité, qu’adviendrait-il du développement rééquilibré du territoire de l’Île-de-France ? Pas sûr qu’il y trouve son compte… Le rôle de coordination de la région Île-de-France avec le schéma d’aménagement de l’Île-de-France (le SDRIF) sur tout le territoire serait de fait remis en question. Les Yvelines, la Seine-et-Marne et le Val-d’Oise se retrouveraient à l’extérieur de ce qui ne manquerait pas d’être vécu comme une nouvelle « relégation », ainsi que l’ont parfois exprimé des élus de toutes les tendances dans ces départements. Les populations des départements voués à disparaître, selon les préconisations en fait de l’UMP (11 élus sur 15 à ladite commission du Sénat) verraient les lieux de décisions s’éloigner un peu plus de leur pouvoir d’intervention. Les ou- -tils de coopération existants, comme par exemple le Syndicat des transports d’île-de-France (STIF) - passé depuis à peine plus d’un an sous la responsabilité de la région -, et ceux à construire entre toutes les collectivités territoriales ne semblent trouver aucune grâce aux yeux du sénateur de l’UMP. Le chef de l’État Nicolas Sarkozy veut frapper fort avec le Grand Paris. Même s’il s’en défend, Philippe Dallier semble bien être son poisson pilote !
Max Staat