Luttes émancipatrices,recherche du forum politico/social pour des alternatives,luttes urbaines #Droit à la Ville", #Paris #GrandParis,enjeux de la métropolisation,accès aux Archives publiques par Pierre Mansat,auteur‼️Ma vie rouge. Meutre au Grand Paris‼️[PUG]Association Josette & Maurice #Audin>bénevole Secours Populaire>Comité Laghouat-France>#Mumia #INTA
8 Septembre 2015
Pierre MANSAT
Ancien adjoint au Maire de Paris chargé de la coopération intercommunale
L’histoire de Paris Métropole remonte au 5 décembre 2001. Ce jour-là, autour du Maire de Paris Bertrand Delanoë récemment élu, conseillers généraux, conseillers régionaux et maires des communes de la 1ere couronne se rassemblent la Maison de la RATP, transformée en lieu de dialogue de la zone dense de l’agglomération parisienne.
C’est le début de l’aventure métropolitaine récente de l’agglomération parisienne. Ce travail de coopération inédit depuis près de 50 ans, trouvera ses premières traductions concrètes quelques années plus tard avec la création de la conférence métropolitaine au mois de juillet 2006.
Depuis lors cohabitent deux tendances, deux dynamiques, l’une fonctionnelle et ascendante, l’autre institutionnelle, plutôt descendante. Ensemble, elles dessinent les contours du nouvel espace métropolitain francilien entre pragmatisme et recherche d’une meilleure gouvernance. Au quotidien, ces tendances sont pourtant difficiles à concilier dans un récit d’avenir métropolitain largement partagé.[1]
Cette situation doit être dépassée sans tarder, afin de donner toutes ses chances au projet de la métropole du Grand Paris. / NB
Le début du mandat de Bertrand Delanoë en 2001 est marqué par des gestes concrets, et la signature d’accords de coopération entre Paris et les communes voisines, à l’image de l’accord de coopération signé avant même 2001 entre le maire du XXeme arrondissement de Paris et le maire de Montreuil. La ville de Paris renouvelle également le cadre contractuel de coopération avec la région Ile de France avec la signature d’un contrat particulier qui couvre de nombreux domaines.
De 2001 à 2005, aux prémices de l’installation de la conférence métropolitaine, le Maire de Paris et son équipe se mobilisent autour d’une vision et d’une conviction.
Pour Bertrand Delanoë, l’agglomération parisienne est appelée inévitablement à se structurer dans une forme de communauté urbaine, comme il l’écrira plus tard en 2009 dans Pour l’Honneur de Paris, mais l’intégration devra être progressive. Il est convaincu qu’une démarche qui serait d’abord institutionnelle serait vouée à l’échec. La priorité est d’installer un vrai dialogue politique entre Paris et la banlieue, avec les communes, avec les départements, avec la région, sur tous les sujets, dialogue rompu depuis la suppression du département de la Seine en 1964. Il s’agit de coopérer autour de projets concrets avec les communes riveraines de Paris et avec les territoires où Paris possède des propriétés foncières importantes. Le débat sur la gouvernance interviendra « quand la situation le permettra ».
Les questions foncières et d’aménagement sont au cœur des enjeux, à l’image du réaménagement de la Porte des Lilas ou la revente des terrains Guillebeaud, ancien parking à cars du parc des Princes, à Boulogne Billancourt, pour être transformés en jardin… Les exemples abondent. Il s’agit d’envoyer des signaux forts et tangibles « à la banlieue », y compris pour la gestion de grands systèmes techniques. Le maire de Paris cède ainsi la présidence du SIAAP (Syndicat interdépartemental pour l’assainissement de l'agglomération parisienne, qui couvre un territoire de 8 millions d’habitants) à un élu de banlieue. En matière de transports et déplacements, une instance de dialogue avec les communes du sud parisien est également mise en place avant de lancer le projet de tramway du boulevard des Maréchaux. En 2005 devant les réticences nombreuses suscitées par le projet du PDU (plan de déplacement urbain) de Paris, un travail de concertation avec les élus des communes riveraines est là encore engagé. La priorité est de bâtir un capital de confiance entre Paris et la banlieue, qui se traduit aussi par des dispositions en matière d’habitat avec la transformation du fonctionnement des commissions d’attribution des logements de l’OPAC de Paris.
L’année 2005 est une année charnière. Le climat est désormais mûr pour franchir une première étape. Le sujet est sensible. Le maire de Paris souhaite que toute évolution vers une intégration métropolitaine puisse s’effectuer en transparence vis-à-vis du conseil régional d’Ile de France et de son président Jean-Paul Huchon. Bertrand Delanoë lance pour la première fois au mois de mars 2005 l’idée d’une « conférence métropolitaine » qui prendra finalement corps un an plus tard avec une première réunion inaugurale qui rassemblera 27 maires de la zone dense de l’agglomération parisienne au mois de juillet 2006 à l’hôtel de ville de Vanves.
La démarche de coopération métropolitaine mise en place en 2001 rencontre un terreau favorable et même un vif intérêt d’acteurs de l’urbanisme, de l’architecture… qui sont nombreux à la soutenir. Mais il faut se garder de tout anachronisme, car elle ne résulte pas d’un mouvement de fond qui l’aurait précédée.
Le sujet Grand Paris a été tellement décrit qu’il est difficile d’imaginer le quasi désert éditorial dans lequel nous avons lancé les démarches de coopération métropolitaine. La matière disponible, les travaux de recherche, les rapports, est sans commune mesure avec le nombre et la diversité des contributions dont on dispose aujourd’hui. En 10 ans à peine, les enjeux de coopération métropolitaine, qui étaient quasi-absents de la scène politique et scientifique, sont devenus un objet de publication à part entière.
Au début des années 2000 au contraire, les contributions sur la grande échelle de l’agglomération, sur la zone dense, sur les limites entre Paris et les communes voisines sont alors éparses, rares, et certainement pas coordonnées. Le plan d’urgence de Michel Rocard pour l’Ile de France qui faisait référence à une forme de grand métro d’agglomération datait de 1989. Le rapport de Christian Bouvier, ingénieur général des Ponts et Chaussées et directeur de l’EPAD qui met en avant pour la première fois La zone dense de l’agglomération parisienne en 1993 avait rapidement été passé sous silence. L’identification d’un « anneau central de l’agglomération parisienne » par l’APUR remontait à 1998, près de six ans après la publication de l’ouvrage de JL.Cohen Des fortifs au périph’ qui datait quant à lui de 1992. Le texte de L’appel pour une métropole nommée Paris publiée par le collectif 75021 animé notamment par Yves Lion datait quant à lui de 1988 et n’avait pas été relayé par les pouvoirs publics.
Il n’y a aucune évidence, aucun chemin historique tout tracé qui définirait spontanément comment et sur quel périmètre organiser la coopération intercommunale et métropolitaine entre Paris et les communes riveraines ou de la zone dense.
Autant que le travail politique, un travail intellectuel et de recherche était donc à conduire, tout aussi déterminant pour la réussite du mandat que le maire de Paris m’avait confié.
Nous avons donc décidé dès le début du mandat de constituer un comité d’experts pour accompagner la réflexion de la municipalité mais aussi pour nourrir et enrichir les débats et la réflexion urbaine. La rencontre avec Annie Fourcaut mérite ici d’être soulignée, tant elle a eu un rôle important dans le domaine de l’histoire urbaine et du logement social, ouvrant la voie à de nombreux jeunes historiens comme Emmanuel Bellanger par exemple, qui commencent à être enfin reconnus.
Pour accompagner la coopération métropolitaine qui démarre, il faut produire des cartes. Produire des monographies. Nous encourageons les travaux qui permettent d’enrichir le débat, à l’image du collectif de jeunes architectes Tomato, dont nous soutenons la publication de l’ouvrage collectif La ville du périphérique en 2003. Nous publions aussi une lettre d’information, Extramuros. Nous cherchons à baliser le terrain pour écrirea suite d’une histoire commune entre Paris et la banlieue.[2]
Il est intéressant de revenir aujourd’hui, à quelques mois de la création de la Métropole du Grand Paris, sur les coulisses de la coopération métropolitaine il y a à peine plus de dix ans de cela. Le succès de l’exposition consacrée par le pavillon de l’Arsenal à L’archipel métropolitain en 2002, travail coordonné par M.Pranlas-Descours est révélateur d’un état d’esprit en train de changer, de l’affirmation progressive de dynamiques nouvelles… autant que des nombreuses lacunes à combler.
Au sein même de l’organisation municipale de la ville de Paris, la situation que nous connaissons aujourd’hui ne doit pas non plus laisser penser que tout était en place dès le début du mandat pour dérouler ensuite un récit métropolitain. C’est même plutôt l’inverse.
La transformation du petit Bureau de la coopération régionale en une mission transversale d’une quinzaine de personnes, sous la forme d’une Sous-direction de la coopération territoriale ne sera effective qu’en cours de mandat. Elle soit s’inscrire dans le cadre plus général des mutations progressives de l’administration parisienne, encore largement empreinte de l’administration préfectorale. Sur le plan politique, les questions de coopération intercommunale sont gérés en lien direct avec le maire et avec son cabinet.
En dehors de Paris enfin, les démarches de coopération intercommunale sont bien accueillies mais non sans réserves et le travail de conviction est à faire pas à pas.
Les voisins de Paris ne perçoivent pas nécessairement les implications et le potentiel de développement à long terme et à grande échelle d’une approche métropolitaine des questions d’aménagement, de logement, de transport et de mobilité… Dès que l’on s’éloigne de la première couronne, les sentiments plus ambivalents encore et l’on craint que cela ne soit qu’une forme de syndicat des voisins de Paris.
La situation est devenue différente et en 2006, même si la conférence métropolitaine rencontre des réticences, la formule ne tarde pas à faire la preuve de son utilité, aussi bien pour le maire de Paris que pour les maires des communes de première couronne et au-delà, qui s’y engagent de plus en plus nombreux.
C’est un espace d’échange et de discussion neutre où les problèmes les plus pressants du moment peuvent être abordés. Les travaux et les rencontres sont régulières et le « parlement informel des maires » devient un lieu incontournable de rencontre, de débat, où se forge une conviction métropolitaine partagée, qui irrigue les territoires, qui irrigue aussi le fonctionnement même de l’administration des municipalités partie-prenante. Mais là encore, il faut éviter tout anachronisme. Il n’existe pas à proprement parler de grand projet métropolitain sur un territoire déterminé une fois pour toute. Volontairement, les élus la conférence métropolitaine ne déterminent pas de périmètre géographie figé, afin de permettre aux territoires du cœur de la zone dense comme à ceux qui sont plus éloignés de celui-ci de prendre part aux délibérations.
L’Etat, qui regardait de loin le développement de la conférence métropolitaine, revient brutalement dans le jeu en 2007 au début du quinquennat de Nicolas Sarkozy. Dans le discours qu’il prononce lors de l’inauguration d’un nouveau terminal à l’aéroport de Roissy Charles de Gaulle au mois de juin 2007, il remet la question d’une communauté urbaine au centre du sujet et porte aussi le débat sur la question de la compétitivité économique et de l’attractivité dans un environnement urbain en voie de globalisation.
La région Ile de France est directement visée par les annonces du Président de la République. Pendant le temps de gestation et d’installation de la conférence métropolitaine, elle veillait avant tout à conforter ses prérogatives nouvelles issues des lois de décentralisation. C’est notamment le cas en matière de transports publics, où la région a pris la présidence du Syndicat des Transports d’Ile de France (STIF) et en matière d’aménagement, où la région avait pris en main la révision du SDRIF, engagée en 2004…
L’annonce de la remise en question de la révision du SDRIF contrecarre directement les travaux de la région, situation accentuée par la nomination de Christian Blanc comme Secrétaire d’Etat au développement de la région-capitale. En ce qui concerne Paris, les choses sont plus nuancées. Il n’y a pas de remise en question frontale, mais l’Etat s’appuie à la fois sur le nouveau Préfet de Région et sur le nouveau Préfet de Police pour tenir le territoire central de l’agglomération parisienne. Dans la perspective des élections municipales du printemps 2008, la priorité immédiate du maire de Paris est d’asseoir la mandature vis-à-vis des parisiens.
Paris reprend l’initiative dès les lendemains des élections municipales en l’organisation des Assises de la métropole au mois de juin 2008 qui réunissent plus de 200 élus franciliens. Christian Blanc y est d’ailleurs présent. Les Assises de la métropole ouvrent la voie à la création d’un futur « syndicat mixte ouvert » établi sur le socle de la conférence métropolitaine et le syndicat Paris Métropole voit finalement le jour au début de l’année 2009.
La période 2008-2011 constitue un moment unique à l’échelle des trente dernières années, voire même au-delà. Pour l’agglomération parisienne, il s’est passé durant ces trois années plus de choses sur le plan institutionnel, sur le plan intellectuel, que dans les 30 précédentes.
La consultation internationale sur le Grand pari(s) de l’agglomération parisienne lancée en 2008 par le Ministère de la Culture mobilise plusieurs centaines d’urbanistes, architectes, chercheurs, étudiants…français et étrangers jusqu’à l’exposition à la Cité de l’Architecture au printemps 2009. Le vote de la loi sur le Grand Paris au printemps 2010, la création de l’Atelier International du Grand Paris, la création des contrats de développement territorial et l’accord entre l’Etat et la région Ile de France qui entérine le projet du Grand Paris Express, suscitent des accords politiques inédits.
La création d’un nouvel espace institutionnel reste toutefois largement inachevée. La prise de conscience du « fait métropolitain » s’est imposée auprès d’une grande majorité d’élus municipaux de toutes les sensibilités politiques mais l’écheveau est rendu plus complexe que jamais parce que la construction métropolitaine repose désormais sur deux dynamiques contradictoires et pourtant étroitement interdépendantes. Le nouveau réseau de transport et les contrats territoriaux semblent dessiner un nouvel horizon, suscitent une large approbation, en particulier des acteurs économiques. Mais ils reposent sur une couche institutionnelle mince et l’intégration du système butte sur l’absence d’une instance d’agglomération que la région se refuse à jouer et qu’elle se refuse tout autant à favoriser.
A la demande de Bertrand Delanoë, la question de la gouvernance métropolitaine et de son institutionnalisation est posée à nouveau au sein du syndicat Paris Métropole, qui proposé à la fin de l’année 2011, un Livre Vert et trois scénarios d’avenir possibles : le statu quo, la confédération, l’intégration. La rencontre organisée à la Mutualité fait salle comble, mais les élus de Paris Métropole ne parviennent pas à trouver un point d’accord et le Livre Blanc qui devait formaliser la position du syndicat ne voit finalement jamais le jour et le processus est un échec, à la veille des élections présidentielles de 2012.
Après les élections présidentielles, des élus appartenant au même parti politique sont à la tête de l’Etat, de la région Ile de France, de la ville de Paris et la gauche est majoritaire à l’échelle de l’Ile de France. Mais la conviction métropolitaine n’est pas d’abord une affaire partisane et la nouvelle carte politique francilienne ne se traduit pas par un redémarrage du chantier institutionnel engagé par Paris Métropole.
Le Nouveau Grand Paris confirme au printemps 2013 le calendrier du Grand Paris Express et les principaux territoires de projet de l’agglomération parisienne ainsi que les contrats de développement territorial. La création d’une nouvelle instance métropolitaine reste toutefois très difficile, comme en témoignent les débats parlementaires touffus autour de la loi dite MAPTAM ou loi de modernisation de l'action publique territoriale et d'affirmation des métropoles en Ile de France. La cohabitation entre une métropole fonctionnelle et ascendante et une métropole institutionnelle et descendante n’est pas vraiment résolue par la mise en place en 2014 d’une mission de préfiguration de la Métropole du Grand Paris. Deux chantiers métropolitains semblent ainsi se côtoyer plus qu’ils ne se rencontrent.
A six mois de la création effective de ce nouvel établissement public de coopération intercommunal, le syndicat Paris Métropole existe toujours et cohabite avec un conseil des élus qui accompagne les travaux de la Mission de Préfiguration de la Métropole du Grand Paris.
Des progrès incontestables ont été accomplis depuis le début des années 2000 et de très nombreux projets et mécanismes de coopération se sont mis en place, qui ont contribué à nourrir politiquement, une vraie dynamique métropolitaine.
Le redémarrage de la coopération métropolitaine en Ile de France a sans doute été rendue possible parce que Paris a décidé voilà une quinzaine d’années de se libérer des limites physiques et symboliques des fortifs et du périph ‘ et de réviser sa relation avec les autres collectivités de l’agglomération. Directement et indirectement, Paris Métropole a contribué à rendre possible le succès incontestable de grands programmes comme le Vélib’, comme Autolib’, comme la création et surtout la prolongation du tramway des Maréchaux, à la rencontre des besoins franciliens et de la transformation des usages de la ville.
Aujourd’hui pourtant, le projet métropolitain est un peu en panne d’idée, en panne de récit et d’une vision d’avenir partagée, comme s’il manquait une envie commune et des réalisations qui l’incarnent et contribuent à lui donner un sens.
La construction de la Métropole du Grand Paris se fait de manière sectorielle et fragmentée aussi bien sur le plan des projets que sur le plan institutionnel. Or l’histoire récente montre la coopération entre les territoires et entre les acteurs est essentielle à l’ancrage des projets et des ambitions et qu’elle ne se décrète pas. Je pense qu’il y a deux priorités pour assurer le succès durable de la construction de la métropole, à toutes les échelles : le développement d’un sentiment d’appartenance, l’implication des forces vives et la convergence des actions menées. Ce devrait être la priorité pour les élus aussi bien que pour l’Etat et la société civile.
[1] Sur le plan institutionnel, le nouvel établissement public que constitue la Métropole du Grand Paris doit se mettre en place à partir du 1er janvier 2016, sur la base des travaux de la Mission de préfiguration qui sont en cours et sur un territoire central de l’agglomération comprenant Paris et les 3 départements de la première couronne. Au-delà de ce périmètre, un nouveau schéma régional de coopération intercommunal (SRCI), dont le projet a été dévoilé au mois de mars 2015, doit structurer de grandes intercommunalités.
[2] Paris-Banlieue, histoires communes, 2006