9 Novembre 2010
Vers Paris Métropole, des histoires en vis-à-vis, Ce hors série [et dernière parution d'Extra muros] est l'outil indispensable pour comprendre l'émergence politique du fait métropolitain de 2001 à 2009.
Avec des textes de ( entre autres) : François Chaslin, Mathieu Flonneau, Simon Ronai, Jean-Marc Offner, Guy Burgel, Aurelien Rousseau, Pascale Thomas, Marie-Christine Gelabert, Bernard Landau, Yannick Beltrando, Daniel Behar, Guillaume Malaurie, Olivier Mongin, Jean Louis Cohen, Emmannuel Bellanger, Annie Fourcaut, Michel Carmona, Christian Lefevre
avec une bibliographie et une chronologie croisée
préface de Pierre Mansat
photos: Le Bar Floréal et François Lacour
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Le texte de mon édito:
La publication du dernier numéro papier d’Extramuros est l’occasion pour moi de dresser un bilan de la construction de la métropole parisienne. Un panorama exhaustif risquerait vite d’être assez fastidieux[1], et exigerait une analyse plus complète de dynamiques politiques, sociologiques, économiques à l’œuvre. C’est donc un retour sur la part qu’a prise Paris depuis qu’en 2001 Bertrand Delanoë a souhaité ouvrir un débat politique d’égal à égal avec les collectivités d’Île-de-France sur l’avenir de l’agglomération parisienne.
Les mots. La métropole est désormais sur toutes les bouches. Bien sûr, l’expression « Grand Paris » peut sembler lui faire concurrence, mais une évidence s’est imposée. Pour dire la « Ville vécue », les catégories administratives étaient en retard. La métropole a mis un mot sur une réalité sentie. Cette victoire sémantique – je mesure le chemin parcouru depuis qu’en 1999, j’ai créé le réseau « Paris métropole ouverte » – a été le fruit d’un travail méthodique mis au cœur de notre action politique. Elle traduit une prise de conscience collective qui s’est installée, d’abord en silence, en nourrissant le débat d’études, d’analyses, d’expositions qui ont produit un nouvel imaginaire. Quelques unes des étapes décisives sont présentées plus loin dans ce numéro, depuis l’exposition sur l’archipel métropolitain, dès 2002, jusqu’à la présentation à la Cité de l’Architecture et du Patrimoine des travaux de la consultation internationale sur le Grand Pari(s) de l’agglomération parisienne. Par une alliance avec urbanistes et géographes, écrivains et historiens, architectes et citoyens, nous avons inscrit la métropole au cœur du débat politique.
Les choses. Des passerelles aux aqueducs, des terrains d’épandage aux festivals littéraires, de la gestion des ordures à la réécriture du SDRIF, ce sont les actes concrets de coopération qui ont donné du corps à ces mots. Ils ont installé dans les faits, par des négociations étalées parfois sur des années, l’idée qu’une page avait été tournée à Paris. Il n’en allait pas seulement de la crédibilité de l’action d’un voisin responsable, mais de prouver par les actes que Paris avait tout à gagner en agir en « termes métropolitains ». Et qu’une problématique d’experts pouvait constituer la matrice d’une nouvelle manière de faire. La coopération, pour Paris, n’a donc jamais été un champ clos, séparé de l’action sur la Ville. Par delà les hauts et les bas de la construction de la métropole parisienne[2], en moins d’une dizaine d’année, l’idée s’est affirmée que la réponse politique à la question de la métropole est au cœur du débat sur l’avenir de l’urbain et sur la nouvelle question urbaine.
Une exigence. La reconnaissance du fait métropolitain n’a évidemment pas été en mesure de mettre, par elle-même, un coup d’arrêt à la mécanique de dissociation qui menace son territoire. L’exigence de faire la métropole reste intacte, avec pour premier impératif de cette métropole durable, une certaine idée de la justice, fondée sur la solidarité. Car on sent bien que l’équilibre social de la métropole se rompt et qu’il faut réconcilier les différents territoires qui la composent. Se dire métropole, c’est accepter de considérer que le mécanisme de segmentation des territoires nous concerne tous. Il est dangereux pour ceux qui sont relégués, mais aussi pour ceux qui acceptent de se laisser enfermer dans un entre-soi désiré, parce qu’il est censé les protéger. Paris regarde désormais vers la métropole où se joue une part de son avenir et de son identité.
La scène. Le dialogue bilatéral d’égal à égal a aujourd’hui donné naissance à une scène politique métropolitaine. D’autres raconteront le rôle de Paris dans cette éclosion de la Conférence métropolitaine puis de Paris Métropole. Je me contenterai de dire que, pour dépasser le tropisme de l’égoïsme institutionnel, le mandat que m’a donné B. Delanoë a été constant sur un point : donner à Paris une place essentielle pour structurer cet élan. Il est impossible de nier que Paris ait à jouer un moteur dans la construction de cette nouvelle scène politique. C’est Paris qui donne au projet sa raison d’être, mais qui est surtout le lien nécessaire, le trait d’union entre les territoires. C’est également Paris qui a dû convaincre que l’enjeu n’est pas d’installer une nouvelle forme d’hégémonie, mais bien de réunir des forces dispersées et le plus souvent concurrentes pour une mise en cohérence des projets. Il faut à la fois admettre la centralité parisienne et reconnaître le poids des autres centres qui structurent la métropole. La scène politique est désormais installée, les acteurs sont présents. Paris doit maintenir son rôle de premier plan, mais la partition n’est pas écrite : elle ne pourra être ni l’unique auteur, ni le régisseur de ce nouveau théâtre politique.
Les paradoxes. La gouvernance de la métropole est encore en chantier. De tous les débats lancés par Paris (dès 2004), c’est probablement celui qui reste le plus ouvert. L’idée que le complexe puisse être ramené à une solution toute faite a fait son temps ; le chemin politique qui mène à une gouvernance de la métropole n’a de chance d’aboutir que s’il s’appuie sur la volonté d’élus, dont le rôle n’a cessé d’être confortés par la décentralisation. En revanche, cette décentralisation ne suffit pas à faire que la métropole prenne une forme politique. Avec une décennie de retard, l’intercommunalité devient aujourd’hui un fait dominant autour de Paris. Simultanément, et de manière paradoxale (après les belles paroles que le Président de la République avaient prononcées en avril 2009 et auxquelles nous avions fait le pari de croire) le projet de Grand Paris se révèle l’occasion d’une recentralisation sans précédent. Seule Paris est en mesure aujourd’hui de proposer une voie de sortie. Instigatrice de cette histoire, Paris a devant elle la responsabilité d’éviter que la construction de la métropole se résume à la juxtaposition de compromis locaux. Il faut résolument viser la mise en place de mécaniques de régulation au sein de la métropole.
Conclusion. L’histoire n’est pas finie. Si Paris fut le point de départ de cette construction, je reste convaincu que le projet de Grand Paris, aujourd’hui porté par le gouvernement, ne peut en constituer le point d’arrivée. On a compris que des enjeux ne peuvent être formulés qu’à l’échelle de la métropole, sans réussir à imposer qu’ils y trouvent des réponses politiques et techniques. La dynamique métropolitaine a commencé à produire son propre imaginaire. L’histoire d’Extramuros se confond avec son émergence dans le débat public. Que ce dernier numéro soit l’occasion, par un peu d’archéologie, d’en comprendre les ressorts, les réussites, la mythologie aussi.