30 Janvier 2012
Gérard Collomb vient de rendre public une note dans lquelle il prend position - entre autres- sur le grand Paris. Voici son texte
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CONTRIBUTION POUR UN ACTE III DE LA DÉCENTRALISATION
Toute l’histoire de notre pays a été marquée par la volonté du pouvoir central
d’imposer son autorité face aux particularismes locaux. L’organisation territoriale de
la France, dans sa forme jacobine, c'est-à-dire uniforme et centralisée, par la
République n’est donc que l’aboutissement d’une tendance à l’oeuvre dès la formation
du royaume de France par les premiers capétiens.
La concentration des pouvoirs au niveau de l’Etat central a longtemps été une chance
pour la France. La constitution d’un pouvoir central fort a permis d’unifier notre pays.
C’est sous son influence qu’à chaque époque s’est développée notre économie
(Colbert et les manufactures, Napoléon III et les chemins de fer, la 5ème République et
ses grands programmes industriels). Mais aujourd’hui la réalité a changé. Dans un
monde où les échanges se font désormais en réseau et non plus de manière pyramidale,
où dépassant les Etats Nation, le niveau européen prend de plus en plus d’importance,
où, surtout nos territoires se sont partout réaffirmés en région, il convient d’acter ce
changement.
La République, dans un esprit de rationalisation, pouvait organiser tout le territoire
autour d’une entité unique : le département. Mais aujourd’hui notre pays est devenue
plus multiforme, et la réalité socio-économique de nos territoires ne correspond
plus guère à leur réalité institutionnelle.
L’économie de la connaissance qui est désormais celle de notre monde, s’accommode
par ailleurs, de moins en moins, d’un système de pouvoir pyramidal à l’heure où elle
se développe sur la base d’écosystèmes fortement ancrés dans les territoires et
fonctionnant en réseau.
Il est donc temps de mettre en oeuvre un acte III de la décentralisation qui acte de
cette évolution. Comprendre qu’il s’agissait là d’un impératif fort avait été la grande
intuition de François Mitterrand et Pierre Mauroy. Avec l’hyper-présidence de Nicolas
Sarkozy, nous avons, hélas, connu un brutal retour en arrière, le pouvoir central
finissant même par se concentrer dans la seule personne du président de la république
voulant disposer de tout, en tout lieu. Cela se traduit au niveau local par un retour d’un
contrôle tatillon de l’Etat au moment même où celui-ci n’a plus ni les moyens
financiers, ni les moyens en personnel pour affirmer sa présence autrement que de
manière procédurière.
De ce point de vue la RGPP a été une caricature, elle a affaibli l’ensemble des services
de l’Etat, là où on aurait pu rechercher des économies financières par une nouvelle
répartition des blocs de compétences avec les collectivités locales. On aurait ainsi évité
un certain nombre de doublons tout en maintenant la présence de l’Etat, partout où elle
s’avérait indispensable (sécurité publique, santé, enseignement…).
Reprenant l’élan décentralisateur de 82-83, nous entendons mettre en oeuvre une
réforme d’ensemble pour faire à nouveau coïncider la réalité économique et sociale de
nos territoires avec leur organisation institutionnelle, permettant par là de donner une
nouvelle dynamique à notre pays.
LE RÔLE RENFORCÉ DES RÉGIONS
Pour cela, nous renforcerons les Régions qui auront la charge de coordonner les
politiques économiques de transports et d’aménagement du territoire en partenariat
avec les métropoles et les villes pôles de rayonnement. Ces régions seront renforcées
par transfert de compétences de l’Etat dans les domaines de l’université, de la
recherche, du financement de l’innovation (décentralisation du FSI), de la formation et
de l’emploi, des politiques de santé. A l’occasion des lois de décentralisation
présentées, les Régions seront encouragées à examiner les limites actuelles de leur
découpage institutionnel pour éventuellement fusionner entre elles.
LE DÉPARTEMENT COMME ÉCHELON DE PROXIMITÉ
Le Département restera partout hors des Métropoles d’Intérêt Européen et
éventuellement du Grand Paris, la collectivité de référence dans le domaine de la
solidarité territoriale, il aura la charge de garantir la pérennité des services publics
(transport, santé, services sociaux…) là en particulier, manque une armature urbaine
suffisante
UNE NOUVELLE ORGANISATION DU RÉSEAU DES VILLES
La nouvelle organisation territoriale prendra en compte ce qui est la caractéristique de
ce 21ème siècle : le renforcement du fait urbain : aujourd’hui 80% des français vivent
dans les villes. L’armature urbaine de notre pays se verra consolider autour de 3
réseaux des villes
a) Les Métropoles d’Intérêt Européen (MIEU)
Ces métropoles en nombre limité, (Paris, Lyon, Marseille) seraient renforcées de
manière à leur permettre de figurer durablement dans le top 20 des grandes villes
européennes. Elles constitueraient une nouvelle catégorie de collectivités territoriales
(au sens de l’article 72 de la constitution). Sur leur territoire ; elles exerceraient
l’ensemble des compétences du conseil général et une partie des compétences des
conseils régionaux dans le domaine de l’université et de la recherche, de l’animation
des pôles de compétitivité, de la promotion internationale.
b) Les Métropoles d’Intérêt National (MIN).
Au-delà des Métropoles d’Intérêt Européen, un certain nombre d’autre grandes villes
(Bordeaux, Toulouse, Nice, Grenoble, Nantes, Strasbourg, ont vocation à être des
lieux de concentration de ressources humaines de haut niveau, de services (transport,
services juridiques, bancaires, recherche), terreau de l’innovation et de la croissance
dans une économie de la connaissance. Elles verront elles aussi leurs compétences
élargies. En provenance des Départements elles exerceront de plein droit les
compétences en matière de transports scolaires, de gestion des routes, des zones
d’activités économiques, de la promotion à l’étranger. De la Région, elle pourrait par
accord exercer des compétences en matière d’accompagnant des entreprises,
d’organisation de l’université et de la recherche, de promotion internationale
c) Les pôles de rayonnement
Enfin il conviendrait de renforcer le réseau des villes qui maillent notre territoire. Ces
villes, (une cinquantaine) elles prendraient la forme de communautés
d’agglomération, centres d’un pôle métropolitain.
d) En dessous de ces trois niveaux les villes de 5000 à 10000 habitants auraient
vocation de développer des pôles d’attractions en coopération fortes avec le
département où elles se situent.
LA REGION CAPITALE : PARIS ET L’ILE DE FRANCE
Peuplée de 11, 5 millions d’habitants soit 18, 3 % de la population française la région
Ile-de-France regroupe 8 départements, 1281 communes, 106 EPCI, 1ère région de
France, son PIB est supérieur à 500 milliards d’euros. Elle constitue aussi la 1ère région
d’Europe, se situant en terme de PIB au 4ème rang mondial derrière Tokyo, New York
et Londres. Cependant, la complexité de son administration est aujourd’hui un frein à
son développement et est à l’origine directe de la paupérisation d’un certain nombre de
ses territoires. La Région Capitale pourrait évoluer de la manière suivante :
1) Le Grand Paris englobant Paris et la petite couronne (Seine-Saint-Denis,
Val de marne, Hauts de Seine) pourrait devenir une collectivité territoriale à
statut particulier se substituant au département.
2) Autour du Grand Paris, Paris Métropole prendrait la forme d’un Pôle
Métropolitain articulant le Grand Paris aux autres pôles urbains des
départements de la grande couronne (Yvelines, Val d’Oise, Seine-et-Marne,
Essonne).