3 Janvier 2012
La petite couronne parisienne cherche la parade à la flambée immobilière
Par Valentin BONTEMPS et Pauline FROISSART
=(Infographie)=
PARIS, 3 jan 2012 (AFP) - Clauses anti-spéculatives, accords avec les promoteurs, préemption: confrontées à une flambée historique des prix de l'immobilier depuis cinq ans, les villes populaires de la petite couronne parisienne tentent d'intervenir sur le marché pour préserver leur mixité sociale.
Entre fin 2006 et fin 2011, les prix des logements anciens ont bondi de 36,5% à Bagnolet, 42,6% à Montreuil (Seine-Saint-Denis) et 43,5% à Montrouge (Hauts-de-Seine). "La pression a été très forte ces dernières années, surtout dans les communes limitrophes de Paris", commente Me Frédéric Labour, de la chambre des notaires d'Ile-de-France.
En cause? La spéculation liée à la hausse dans la capitale. "Il y a un effet de vases communicants", décrypte Me Labour. "Les gens ne peuvent plus acheter dans Paris intra-muros. Du coup, ils se reportent sur les villes voisines."
Ce phénomène bouleverse l'équilibre des villes. "Le risque, c'est que les nouveaux habitants se substituent aux classes populaires, chassées par la hausse des prix", relève Anaïs Collet, chercheuse à l'université Paris-Dauphine et spécialiste de ce processus de "gentrification".
Pour conserver leur mixité sociale, plusieurs communes, notamment de gauche, ont décidé de développer des mécanismes de contrôle des prix comme la signature de conventions avec les promoteurs leur demandant de vendre les logements à des prix inférieurs au marché, ou de les proposer prioritairement aux habitants de la ville.
"S'ils refusent, nous ne délivrons pas de permis de construire", précise le maire socialiste de Pantin (Seine-Saint-Denis), Bertrand Kern.
Les collectivités "démunies"
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A Saint-Ouen (Seine-Saint-Denis), la municipalité communiste vient de signer une charte avec 27 promoteurs, qui respecteront un prix moyen de vente de 4.150 euros/m2 dans le futur quartier des Docks quand le prix du marché est estimé à 4.600 euros/m2.
Pour éviter que des propriétaires peu scrupuleux profitent des prix encadrés pour acheter à bas prix et revendre rapidement en empochant une plus value, d'autres mairies, comme Nanterre (Hauts-de-Seine), ont mis en place des clauses anti-spéculatives sur les logements aidés.
D'autres (Ivry-sur-Seine, Saint-Ouen, Champigny-sur-Marne...) vont plus loin, en utilisant leur droit de préemption urbain (DPU) pour acquérir des logements à bas prix quand les prétentions des vendeurs leur paraissent excessives.
"On a fixé un prix de sortie de 4.000 euros/m2, et on dit aux propriétaires et aux promoteurs: attention, si vous dépassez les 4.000 euros/m2, on préemptera", explique Daniel Mayet, adjoint au logement à Ivry-sur-Seine (Val-de-Marne).
En général, la situation se règle "à l'amiable", le DPU agissant comme un moyen de pression, note l'adjoint. Mais "le droit de préemption nous permet de créer un prix de référence, modéré, et d'empêcher les prix du privé de s'envoler".
Aucun de ces dispositifs, toutefois, ne constitue une panacée. "Face aux prix du marché, les collectivités sont un peu démunies", concède-t-on à la mairie d'Aubervilliers. "L'objectif, c'est de contenir la hausse. Aller plus loin, le droit ne nous le permet pas", ajoute Bertrand Kern.
De l'avis de Me Labour, "pour faire baisser les prix, la solution la plus efficace reste la construction de logements, car la hausse est avant tout liée à un déséquilibre de l'offre et la demande".
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