1 Mars 2010
C'est avec peine que j'écris que cet article est assez piteux. Même Paris Métropole - dont on n'explique pas ce dont il s'agit - est au service de Nicolas Sarkozy
Quant à Anne Hidalgo - j'étais protagoniste de la soirée évoquée- elle avait organisé cette réunion pour mettre sur la table des régionales la question métropolitaine et l'avenir de Paris dans cette métropole. Pierre Mansat.
Un coup politique.
Presque absent du débat sur les élections régionales, le Grand Paris est revenu par la grande porte élyséenne avec une interview fleuve parue dans la revue l’Architecture d’Aujourd’hui d’un chef de l’état qui jurait par tous les saints se tenir à distance de la campagne. Las, les dérapages des candidats UMP franciliens et la promesse d’élections victorieuses pour la gauche l’auront forcé à sortir de son simulacre de silence. En donnant sa vision du Grand Paris, le président contraint ainsi la majorité sortante à se positionner à partir de ses propositions sur un projet qui structurera la métropole pour les décennies à venir.
Mi-février, Anne Hidalgo, tête de liste socialiste à Paris, faisait déjà mine de se demander où était passé le Grand Paris dans la campagne. Nicolas Sarkozy a repris la main et joué en quelque sorte sa dernière carte. Certainement la plus politique.
En énonçant sa vision de la métropole, le président de la République prie la gauche de sortir des « querelles ». Plus d’opposition donc, mais un seul et même projet où tout le monde travaillerait en bonne intelligence. Le Grand Paris permet ainsi à Nicolas Sarkozy de sortir d’un débat nationalisé par la gauche, qui présente les régions comme autant de pôles de résistance à la politique de casse sociale entreprise par le chef de l’état. Au moment où le taux de chômage atteint 10 %, son plus haut niveau depuis dix ans, et où s’annoncent de difficiles négociations sur la réforme des retraites, le président de la République entend imposer ses thèmes afin de sortir de l’ornière.
Il y a un an déjà, lorsque Nicolas Sarkozy dévoilait les contours du Grand Paris, il court-circuitait la fin de mandat de Jean-Paul Huchon, le président (PS) sortant de la région, et soulevait une bronca chez les élus qui accusaient le chef de l’état d’ingérence. Le président socialiste de la région s’est empressé de réagir et de suggérer que le Grand Paris mettait de côté « toute démarche partenariale avec les collectivités locales ». Au-delà des envolées sur un Grand Paris calqué sur le modèle de développement de la métropole londonienne, d’aucuns s’interrogent sur les perspectives au-delà du fameux « grand huit », ce métro automatisé qui relierait les pôles économiques et les aéroports de l’Îlede-France. En sus de la possibilité de préempter des terrains autour des gares, la Société du Grand Paris pourrait éventuellement disposer de compétences en matière de politiques locales de l’habitat, d’organisation des activités économiques, des loisirs et du tourisme, ou encore du renouvellement urbain. Une fois les territoires stratégiques définis, tous les textes actuels d’aménagement devront s’y subordonner. Des plans locaux d’urbanisme jusqu’au futur schéma directeur régional d’Île-de-France (Sdrif). Pour le président de la République, « l’état ne peut pas se désintéresser de territoires qui produisent près d’un tiers des richesses nationales. Même si les collectivités locales en sont naturellement les gestionnaires, elles ne disposent pas, pour l’instant, des instances de coordination nécessaires ». Ainsi, Paris Métropole, sous couvert d’assemblée métropolitaine, permettrait au chef de l’état de prendre pied dans les décisions. Comment, dans ce contexte, la région interviendra-t-elle en termes d’aménagement?
Pour Pierre Laurent (PCF), tête de liste, cette vision du Grand Paris « cache un projet qui ne sert en fait qu’une minorité de Franciliens. Le Grand Paris de Valérie Pécresse, c’est le Paris des grands, le Paris de la finance, le Paris des actionnaires, au détriment des populations. Le projet de métro automatique’ est emblématique de cela. Il coûtera plus de 20 milliards d’euros pour relier les centres d’affaires aux aéroports de la région. C’est sûrement très utile pour les actionnaires de la Défense qui ne risqueront plus de rater leur avion pour être à l’heure à Tokyo pour l’ouverture de la Bourse. Ça l’est nettement moins pour les millions de salariés qui mettront toujours autant de temps à se rendre à leur travail. ».
De plus, ce métro sous-terrain renvoie au projet de ligne qui devait relier la capitale à l’aéroport Charlesde- Gaulle sans que les passagers n’aient vue sur les quartiers défavorisés de la Seine-Saint-Denis durant le trajet. Sans nul doute, le grand huit prévu par le président de la République occultera totalement la requalification des quartiers, déjà mise à mal par des financements de mise à mal par des financements de l'Agence nationale de rénovation urbaine en forme de points d'interrogation.
De fait, Roger Karoutchi, président du groupe UMP à la région, a levé le voile en suggérant qu'il s'agissait de « conforter la place de l'Île-de-France dans la compétition mondiale ». De son côté, Pierre Laurent réaffirme la nécessité de voir les budgets « orientés vers les territoires et les populations qui en ont le plus besoin ». Dans l'en-commun du Grand Paris voulu par le président, où un habitant de Courbevoie aurait le même sentiment d'appartenance qu'un résident du troisième arrondissement, il n'a effectivement presque jamais été question de péréquation fiscale entre des quartiers comme celui de la Défense et les zones délaissées.
Lina Sankari