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Pierre Mansat et les Alternatives

Luttes émancipatrices,recherche du forum politico/social pour des alternatives,luttes urbaines #Droit à la Ville", #Paris #GrandParis,enjeux de la métropolisation,accès aux Archives publiques par Pierre Mansat,auteur‼️Ma vie rouge. Meutre au Grand Paris‼️[PUG]Association Josette & Maurice #Audin>bénevole Secours Populaire>Comité Laghouat-France>#Mumia #INTA

Christian Chevandier, « Compte rendu de Annie Fourcaut, Emmanuel Bellanger et Mathieu Flonneau (dir., Paris/Banlieues. Conflits et solidarités…, 2007 » Le Mouvement Social

Le débat à propos des rapports entre Paris et la banlieue, entre la ville et sa périphérie mais aussi entre la ville et des entités qui peuvent se vouloir ou être voulues indépendantes, accompagne et étaye depuis plus de deux siècles la croissance de la capitale. D’Haussmann à nos jours, l’intensité des échanges aura été inégale. Lors des trois dernières décennies, la force du questionnement fut très relative, au point d’amener l’architecte Paul Chemetov à parler de « trou noir » de la réflexion. La discussion avait été mise en sommeil par la réforme de 1964 qui modifiait le découpage administratif de la région parisienne et divisait en sept départements la Seine et la Seine-et-Oise. Paris restait une ville, mais devenait un département. La question des relations entre Paris et sa banlieue fut alors enfouie jusqu’à la fin du siècle. Elle ressurgit à la faveur de la victoire de la gauche qui, en 2001, emporte l’Hôtel de Ville. Le nouveau maire socialiste, Bertrand Delanoë, charge le communiste Pierre Mansat, d’une nouvelle délégation, celle des « relations avec les collectivités territoriales d’Île-de-France ». Sous une dénomination très neutre, il s’agit de repenser les rapports entre Paris, la ville-centre, et la périphérie densément urbanisée. La municipalité fait appel à des historiens pour mettre en perspective l’histoire de ces relations. De 2003 à 2005, un séminaire organisé par une équipe du Centre d’histoire sociale du XXe siècle (CNRS/Université de Paris 1), rassemble autour d’Annie Fourcaut, l’essentiel des chercheurs travaillant sur ces questions, historiens mais aussi urbanistes. Comme souvent, le choix du lieu des séances n’est pas innocent. Si nombre d’entre elles se tinrent à l’hôtel de Ville, certaines eurent lieu en banlieue, à Montreuil et à Nanterre. Ce livre peut être considéré comme le produit du séminaire. À l’instar de la délégation de Pierre Mansat, il signale aussi que l’heure de la réflexion est aujourd’hui venue. La question des rapports entre les différentes collectivités territoriales au sein de l’agglomération n’est pas nouvelle.

La notion d’un « Grand Paris » apparaît dans les années 1920. Le plan Henri Prost fut débattu au cours de la décennie suivante, mais n’a pris en compte que la périphérie sans s’attarder sur la ville elle-même. Lors du redécoupage administratif, dans les années 1960, ce thème rebondit. Une nouvelle étape est engagée depuis 2001, qui se caractérise par une grande prudence car le nombre des communes concernées est désormais considérable. Si la plupart étaient encore rurales aux lendemains de la Grande Guerre, la croissance de l’agglomération, tout comme l’étroite imbrication des collectivités territoriales, ont radicalement changé la donne. Depuis le milieu du XIXe siècle, Paris présente cette originalité, parmi les grandes métropoles, d’être entourée par une ceinture visible, situation aberrante au regard des autres métropoles européennes. Cette ceinture est à l’origine d’un élément qui a peu évolué, et c’est bien une des clefs du problème : la superficie de Paris. Les rares changements en ce domaine n’ont fait qu’aigrir les rapports avec ses voisines. Fixée en 1860 avec l’annexion des communes suburbaines, elle correspond à l’emprise délimitée par l’enceinte de Thiers. La loi du 19 avril 1919 « relative au déclassement de l’enceinte fortifiée de Paris » a agrandi le territoire de la ville en incluant les fortifications déclassées et la zone militaire. Cette décision de dépossession au profit de la capitale fut mal vécue par les municipalités de la première couronne. Les procédures entamées à son encontre durèrent près d’un quart de siècle. Mais l’expansion de Paris au détriment de ses voisines ne se résume pas à la loi de 1919 et à l’intégration des bois de Boulogne et de Vincennes. La banlieue accueille aussi tout ce que rejette la ville. Ce furent d’abord ses déchets et vidanges. Dès la Restauration, par une conduite ou par bateau sur le canal de l’Ourcq, les ordures de Paris furent expédiées par la « voirie de Bondy ». En pleine campagne, cet épandage ne posait pas vraiment de problème, mais le développement des villages avoisinants, les besoins croissants de Paris, les leçons des hygiénistes, tout s’est conjugué pour que, dans les années 1870 et 1880, l’inquiétude des riverains fût à son comble. Autre usage de l’espace périphérique : celui des cimetières. Ceux du Père-Lachaise, de Montmartre, de Montparnasse avaient déjà été installés hors de Paris, à l’époque de l’enceinte des Fermiers généraux. Les 13 nécropoles intra-muros furent vite saturées. Dans les années 1860, de nouveaux cimetières furent inaugurés ou agrandis au cours des décennies suivantes. Ils constituent, sur plus de 320 hectares, une emprise considérable qui contrarie le développement des communes suburbaines d’accueil : Saint-Denis, Clichy, Saint-Ouen, Ivry, Pantin-Bobigny, Bagneux et Thiais. Et puis, il y a les vivants. Il était prévu en 1868 de transférer à Nanterre le dépôt de mendicité de Saint-Denis. Nous savons ce qu’il advint de ce projet malgré la forte opposition locale. La question n’était pas nouvelle. Les deux principaux établissements de l’Hôpital général instauré sous Louis XIV - La Salpêtrière et Bicêtre - étaient hors de Paris. Le problème de la situation de la Salpêtrière se posa un siècle plus tard, au moment de l’édification de l’enceinte des Fermiers généraux. Il fut résolu par l’intégration à l’abri du tracé d’un nouveau mur extérieur. Nous savons à quel point les logements sociaux, notamment dans les banlieues Nord et Est, ont pu être une façon d’éloigner la pauvreté et les effets d’une industrialisation qui n’a épargné le territoire de la capitale qu’à partir des années 1950. Le développement des activités parisiennes et le rejet hors des murailles de ce que la ville ne voulait plus, par la création de zones industrielles, de cimetières, réalisent un espace d’autant plus difficile à gérer que l’étendue de ces emprises détache de fait des quartiers, sépare des communes. Nourrie de préjugés, la dimension conflictuelle de la relation entre Paris et le reste de l’agglomération est indéniable, en dépit d’exemples de coopération efficace, tels ces réseaux d’égouts gérés de façon intercommunale. La politique d’empiètement de la capitale a ainsi forgé une identité suburbaine très forte, un patriotisme de clocher parfois. Elle a aussi pu transcender les limites communales, unir au delà des clivages partisans des élus locaux qui ont su négocier avec la capitale une politique de désenclavement. Un homme comme Henri Sellier ne doit pas seulement être appréhendé en tant que maire de Suresnes, mais aussi comme le rapporteur de la loi de 1937 autorisant la création d’un syndicat intercommunal. Aussi bien est-ce à l’échelle de l’agglomération qu’il faut apprécier la politique de l’Office départemental du département de la Seine et des cités-jardins.

« Historiographie, anthologie, chronologie », cet ouvrage est un livre d’historiens, un outil de travail mis aussi à la disposition des non-spécialistes. Le parti pris de la chronologie y est fort et permet d’insister sur l’événement fondateur, l’annexion de 1860. Les 60 pages de chronologie très fine couvrant la période 1860-2006 redouble ce choix. Après une introduction historiographique de 35 pages centrée sur la dynamique de l’entreprise (« Une histoire en chantier »), le cœur de l’ouvrage se compose de textes et de documents analysés et mis en perspectives. C’est précisément cette présentation qui produit du sens, celui d’une histoire en train de se faire. Sont ainsi soumis au lecteur une lettre écrite par un médecin, en 1878, à propos de la « voirie de Bondy » ; la délibération du conseil municipal de Pantin, le 2 avril 1886, sur l’« établissement d’un Cimetière Parisien sur le territoire de la commune » ; le discours prononcé par Pierre Messmer, alors Premier Ministre, pour l’inauguration du périphérique. Dernier point, loin d’être négligeable à l’heure de la concurrence du numérique, l’édition, d’une grande qualité, comme tout ce que publie Créaphis, se révèle d’une lecture fort agréable. Christian Chevandier

Fourcaut (Annie), Bellanger (Emmanuel) et Flonneau (Mathieu), sous la direction de, Paris/Banlieues. Conflits et solidarités. Historiographie, anthologie, chronologie 1788-2006. Paris, Créaphis, 2007, 479 pages.

Pour citer Christian Chevandier, « Compte rendu de Annie Fourcaut, Emmanuel Bellanger et Mathieu Flonneau (dir., Paris/Banlieues. Conflits et solidarités…, 2007 », Le Mouvement Social, et en ligne : http://mouvement-social.univ-paris1.fr/document.php?id=981.

 

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