5 Janvier 2009
Contre l'avis du président de région, le projet d'une rocade séduit Paris et des élus de tous bords de la petite couronne.
VINCENDON Sibylle
Aujourd'hui, le président PS de la région Ile-de-France, Jean-Paul Huchon, va peut-être se sentir un peu seul. Dans la salle de la mairie de Montreuil, où se tiendra la deuxième réunion de la Conférence métropolitaine, il risque de voir émerger une coalition inattendue contre lui : celle des élus qui veulent le Métrophérique, rocade de métro en première couronne de banlieue, souhaitée tout autant par la socialiste ville de Paris, que par le communiste Val-de-Marne ou le fief UMP des Hauts-de-Seine. Projet dont la région, elle, ne veut pas.
Episode. La rencontre de deux questions épineuses peut parfois produire une dynamique porteuse. D'un côté, il y avait le développement désordonné du centre de l'Ile-de-France. Il a entraîné la création de la Conférence métropolitaine en juillet. De l'autre, il y avait l'embarrassant épisode de l'élaboration du plan de déplacements de Paris, dont la première mouture, fourre-tout de dizaines de mesures tous azimuts pour diminuer l'usage de la voiture dans la capitale, avait été rangée vite fait au printemps dernier. L'incident a été clos par la promesse qu'on reverrait tout ça à tête reposée, à la Conférence métropolitaine.
Or voilà qu'entretemps le nouveau président de la RATP, Pierre Mongin, a inauguré son poste en remettant sur le tapis le vieux projet de rocade de métro Orbitale, rebaptisé Métrophérique. Une ligne creusée à trois ou quatre kilomètres du périphérique et qui réglerait de sérieuses difficultés de saturation, car «10 % des voyageurs du métro parisien font du banlieue-banlieue», dit-on à la RATP.
Ce projet enthousiasme les élus du Val-de-Marne, tous bords confondus. Il plaît énormément à Denis Baupin, adjoint Vert aux transports à Paris, qui y voit un outil puissant pour appuyer la baisse de l'usage de la voiture dans la ville. Il est soutenu par le bureau provisoire de la Conférence métropolitaine, qui réunit Mireille Ferri, vice-présidente Verte du conseil régional, Jacqueline Rouillon, maire PC de Saint-Ouen, Bernard Gauducheau, maire UDF de Vanves, Gilles Catoire, maire PS de Clichy et Pierre Mansat, l'adjoint PC de Paris aux relations avec les collectivités territoriales d'Ile-de-France. Ces cinq élus disposent d'une étude commandée à l'Atelier parisien d'urbanisme, qui chiffre l'augmentation des déplacements dans la petite couronne à 15 % d'ici 2020. D'autant plus que le schéma directeur d'Ile-de-France, en cours de révision, prévoit de renforcer l'urbanisation de la zone centrale.
Chiffrage. De tout cela, Huchon ne veut pas entendre parler. Il a qualifié le Métrophérique de «métro féerique» et n'y voit, explique son entourage, qu'«une nécessité managériale»,«un projet un peu phare qui soude l'entreprise». Les quatre milliards d'euros annoncés par la RATP, dit-on au conseil régional, représentent un chiffrage «daté, fait au doigt mouillé, et tous les projets de la RATP ont entraîné 20 % de surcoût». Face à ces accusations, à la Régie, on se dit «stupéfait». Sur 17 projets d'un montant total de 2,5 milliards, «la dérive financière n'a été que de 6,4 %», précise-t-on.
Le conseil régional rappelle aussi que le Stif, l'autorité transports que préside Huchon, doit financer d'autres infrastructures dans le prochain contrat de projet 2007-2013 et qu'il n'a pas de crédits pour le Métrophérique. A la rigueur, «le Stif peut accepter de financer des études». Impeccable, relève la RATP. «Il y a toute une procédure en amont et pas besoin de consommer des crédits travaux avant 2011-2012.»
D'une manière plus générale, Jean-Paul Huchon pourra-t-il résister «à la pression qu'on sent monter», comme le dit Pierre Mansat ? «Il s'agit de savoir si l'on est porteur d'une vision d'avenir pour la région ou si l'on défend une forme de saupoudrage de la grande couronne», poursuit-il. D'autres se demandent simplement «comment Huchon va pouvoir tenir politiquement».