Rédigé par Pierre MANSAT et publié depuis
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Patrick Berger, une autre vision de la ville
L'architecte urbaniste et son partenaire ont conçu la future canopée des Halles
IL EST À LA FOIS central et discret.
Central parce qu'on lui doit quelques lieux importants de
la capitale : la toute récente piscine Alfred-Nakache de Belleville et son complexe sportif, le
parc André-Citroën, la restauration du viaduc des Arts ( dans le 12 e arrondissement sous la
fameuse « Coulée verte» où s'agrègent artisans et créateurs ) ... et, en 2012, le carreau des
Halles, qui redessinera le visage de l'actuel Forum des Halles. Discret parce que de son propre
aveu, cet architecte, associé à son confrère Jacques Anziutti depuis quelques années, ne
répond qu'à très peu de concours: « Quatre par an environ, quand certains de mes confrères
vont jusqu'à 40. »
Né en 1947, lauréat du grand prix national de l'architecture 2004, cet homme réfléchi a un
certain goût pour l'éclectisme : l'un de ses premiers chantiers fut la reconversion du Palace,
qui allait devenir le temple de la fête parisienne des années 1980. Il a voyagé aussi: éthnoarchitecture
au Népal, conception d'un nouveau centre historique pour Samarkand, en
Ouzbékistan ...
Dans sa philosophie, l'intuition l'emporte haut la main sur l'esprit de compétition : « Pour le
carreau des Halles, je n'ai pas répondu au premier concours, le " marché de définition" parce
que je ne sentais les choses assez mûres. » Lauréat du second concours, il a imaginé une «
canopée », sorte de voûte organique destinée à chapeauter l'actuel Forum, et pour laquelle il a
recherché une forme essentielle, inspirée de la nature, où « rien n'est gratuit. Une spirale de
coquillage, la complexité d'une écaille, proches de la perfection esthétique, sont toujours
expliquées par leur fonction. De la même manière, j'ai voulu une forme qui naisse du sol,
orientée est-ouest, et j'ai longuement étudié les flux : personnes, air, lumière, avant de
concevoir cette construction. Je n'aime pas l'idée de parachuter une architecture sans osmose
avec son milieu urbain. » Lequel impose des contraintes: le chantier ne doit pas interrompre
la vie commerçante et associative du Forum.
Fidèle à cet esprit chercheur, et plutôt que de concourir pour le chantier du Grand Paris, il a
accepté d'en rejoindre le conseil scientifique. Et y consacre une importante réflexion : «
J'espère qu'on ne limitera pas le Grand Paris aux problèmes de transports et à quelques
projets symboliques. On est devant une terre inconnue. On ne peut plus aujourd'hui s'asseoir
et faire un plan, car pendant ce temps la ville aura déjà bougé en mille endroits. Impossible de
reléguer, comme avant, ce dont on ne veut pas à la périphérie. Pour réussir, il faudra mener
une multitude d'actions : prendre en compte les zones de nuisance, et l'entrelacement entre
nature et construction : pourquoi pas de l'agriculture en ville ? Contrairement à Paris, la
banlieue est réduite à un cliché, inconnue du monde. II faut donc offrir à ses habitants une
nouvelle représentation de leur environnement, en soutenant l'art ... » Dans un chantier d'une
telle envergure, Patrick Berger est assurément un atout précieux.