20 Juin 2018
La capitale va présenter ce mercredi sa contribution au futur schéma de cohérence territoriale de la Métropole, qui sera bouclé en 2020. Un document qui éclaire un paysage pour le moins contrasté.
Avant de décider comment organiser l’avenir, il faut commencer par examiner le présent. Cet état des lieux, on le trouve dans les contributions que les territoires de la Métropole du Grand Paris apportent au futur schéma de cohérence territorial (Scot), censé dessiner cet avenir. Rendue publique ce mercredi, la contribution de Paris dessine un état des lieux qui dépasse le plus souvent les frontières de la capitale et montre que l’agglomération parisienne cumule le meilleur et le pire. Extraits.
Paris (presque) reine du monde
Au rayon séduction, Paris a ce qu’il faut. Désormais bien ancrée dans le top 3 avec Londres et New York, la capitale représente aussi le cinquième PIB des métropoles mondiales, la première destination touristique, la première concentration de chercheurs et l’une des agglomérations qui reçoivent le plus d’étudiants grâce à ses nombreuses universités et à leur prix, nettement plus abordable que dans les pays anglo-saxons. Moins attendu, elle est aussi dans le peloton de tête des villes qui accueillent le plus d’événements sportifs internationaux.
Cela posé, «la métropole parisienne est souvent citée parmi les moins attractives pour la qualité et le cadre de vie», constate la contribution. En cause : le prix les logements trop rares et trop chers, le manque d’espaces naturels, la pollution de l’air, pour laquelle la France a été renvoyée en mai devant la Cour de justice de l’Union européenne par la Commission. Côté transports, le fait que les habitants de la région parisienne consacrent une heure et demie à deux heures par jour aux déplacements domicile-travail n’est pas non plus une excellente publicité.
La capitale des inégalités
Sur ce chapitre, le tableau parisien n’est pas réjouissant. Le taux de pauvreté est plus élevé à Paris qu’en Ile-de-France et au-dessus de la moyenne française. L’écart entre les 10% les plus riches et les 10% les plus pauvres va de 1 à 9. Et dans la Métropole du Grand Paris, on trouve à la fois les deux départements où le revenu médian des habitants est le plus élevé de France (Paris et les Hauts-de-Seine) et celui qui affiche le plus faible (Seine-Saint-Denis).
Conséquence logique : les ressources fiscales des collectivités de la métropole font le grand écart. La CVAE, taxe payée par les entreprises, calculée par habitant pour rendre les choses comparables, «varie de 1 à 8 entre le territoire le plus pauvre et le plus riche». Et l’implantation des nouveaux bureaux montre que le déséquilibre historique de la métropole, qui empile les emplois à l’ouest et les habitants à l’est, n’est pas près d’être corrigé : «En matière de bureaux, il n’existe pas à l’heure actuelle dans la métropole de vision d’ensemble sur l’adaptation de l’offre à la demande. De manière globale, la tendance est à la surproduction de bureaux, tant que le marché absorbe les nouvelles surfaces créées, et à la sous-production de logements et de surfaces à vocation productive ou logistique, moins rentables.»
La mesure des inégalités passe également par des indicateurs moins globaux mais tout aussi instructifs. Côté scolaire, l’enseignement privé «rassemble à Paris 7 fois plus d’élèves de milieux favorisés que le secteur public». De surcroît, un quart des effectifs provient d’autres communes, ce qui n’arrange pas la situation des écoles et collèges de la première couronne. Côté santé, le décompte du nombre de médecins spécialistes par habitant le long de la ligne B du RER, qui relie les quartiers populaires de Seine-Saint-Denis aux communes favorisées des Hauts-de-Seine «s’inscrit dans un rapport de 1 à 30».
Le logement, dossier décourageant
Le constat est déprimant : «L’augmentation continue de la pression immobilière conduit à l’éviction progressive de toute une frange de la population que la production de logements sociaux n’arrive pas seule à endiguer.» Cela se traduit dans les chiffres avec une attribution pour dix demandes de HLM et, dans la métropole, 490 000 ménages sur liste d’attente. Quant au parc privé, il affiche des prix et des loyers qui «ont renoué avec les plus hauts niveaux historiques». Phénomène encore plus préoccupant : «La métropole est confrontée depuis plusieurs années à une urgence sociale liée à l’augmentation des personnes à la rue.» Renforcée par la crise des migrants, «dont les effets se concentrent sur la capitale et les communes limitrophes».
Pollué, surchauffé, inondé ?
Paris apparaît en rouge dans toutes les cartes de la pollution en Ile-de-France et ce, pour les trois principaux polluants (CO2, NOx et particules fines). La situation de la capitale est paradoxale. Les Parisiens utilisent fortement leur réseau de transports en commun, font souvent leurs courses à pied (une rareté en France) et, en résumé, «émettent individuellement moins de polluants atmosphériques». Mais ils sont quand même ceux qui respirent l’air le plus sale.
Toutefois, améliorer la qualité de l’air ne peut se faire qu’au niveau de la métropole. 60% de l’énergie qu’elle consomme est consacrée au chauffage et 97% est produite en dehors du territoire. Pour corriger ces trajectoires, il va falloir booster la rénovation thermique des batiments et utiliser les gisements géothermiques qui constituent «une ressource énergétique encore largement sous-exploitée».
Sur un plan plus général, le réchauffement climatique promet au Grand Paris des séquences de 16 à 45 jours de canicule. A cet égard, la végétalisation de la ville n’est pas un gadget. Le changement climatique va, d’un autre côté, obliger la zone centrale de l’agglomération parisienne à envisager sérieusement le retour de la crue centennale. Les inondations du printemps 2016 et de l’hiver 2018 ont donné un avant-goût de l’épisode. Là, c’est plutôt une stratégie d’augmentation des sols perméables qu’il va falloir développer, or au vu des hectares de parkings bitumés qui ceinturent la métropole, ce n’est pas gagné.