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Pierre Mansat et les Alternatives

Luttes émancipatrices,recherche du forum politico/social pour des alternatives,luttes urbaines #Droit à la Ville", #Paris #GrandParis,enjeux de la métropolisation,accès aux Archives publiques par Pierre Mansat,auteur‼️Ma vie rouge. Meutre au Grand Paris‼️[PUG]Association Josette & Maurice #Audin>bénevole Secours Populaire>Comité Laghouat-France>#Mumia #INTA

Quelles mégapoles a l'horizon 2030, une rencontre de la CCIP,

http://ddata.over-blog.com/xxxyyy/0/54/07/70/cciptable-ronde.pdf

En Janvier 2006 j'ai participé à cette table ronde organisée par la CCIP, en partenariat avec les Echos, avec Pierre Veltz, Roland Castro,Pierre Simon, Pierre Mirabaud, Nicolas Jacquet....Mardi 17 janvier 2006

Chambre de commerce et d'industrie de Paris 27 avenue de Friedland 

 Introduction Nicolas JACQUET

Directeur général de la Chambre de commerce et d'industrie de Paris

Je suis très heureux de vous accueillir au nom de la Chambre de commerce et d'industrie de Paris.

La métropolisation nous interpelle. Elle constitue une forme d?urbanisation à grande échelle, qui consacre, après le passage historique de la ville à la métropole, l?émergence de la mégapole. Ce phénomène implique un certain nombre de défis sociaux et économiques. Ainsi, l?Ile-de-France concentre une grande part des ressources nationales sur son territoire, comme, par exemple, 45% des chercheurs français. 3 000 brevets y sont déposés annuellement, contre 1 000 dans la région Rhône-Alpes.

Ce phénomène de concentration est mondial ; c'est pourquoi notre réflexion devra nous mener hors du cadre français. En Corée du Sud, la population rurale est passée de 72 à 19% en une quarantaine d'années. Séoul représente aujourd?hui 50% de la population coréenne. Bombay est quant à elle passée de 3 à 15 millions d?habitants en quelques années. Elle devrait en compter 30 en 2025. Dès lors, ne sommes-nous pas rentrés dans l'ère des mégapoles (selon l'ONU une mégapole est une ville comptant plus de 8 millions d'habitants) ? Dans le monde ancien, de très grandes villes ont existé : Rome, Alexandrie ou Xian. Pourtant, le mouvement d'urbanisation actuel est sans commune mesur e avec le passé. On peut se demander, en reprenant les propos d?Emile Verhaeren, si « la ville, comme une main, les doigts ouverts, se referme sur l?univers », si la nouvelle ville-monde structure notre organisation spatiale.

En 1950, seules New York et Londres étaient des mégapoles. En 1995, le monde en comptait 23 ; il en comptera 33 en 2015 selon l?ONU. Les défis de développement sont à la hauteur du phénomène. Allons-nous véritablement dans le sens d?une urbanisation toujours plus poussée ? Aujourd?hui, deux scénarios sont envisageables. Le premier privilégie la logique de réseau et consacre le dépassement de la mégapole par un ensemble encore plus gigantesque : la mégalopole. Dans cette optique, et si l?on considère le cas de l?Asie, le mode d?organisation en réseau urbain du delta de la rivière des Perles, et ses six ou sept mégapoles reliées entre elles, supplante celui de villes comme Shanghai, Hong-Kong ou Canton. Ce type de réseaux de mégapoles favorise le développement en commun de modes de vie, de modes de transport et de comportements économiques.

Le second scénario possible est illustré par le modèle de développement urbain de l?Ile-de-France. Ainsi, ceux qui évoquaient, il y a quelques années, Paris et le désert français sont aujourd?hui démentis. En effet, le TGV ou la « rurbanisation », phénomène de vie en deux temps urbain et rural, équilibrent la prépondérance de Paris. Selon ce scénario, les contraintes inhérentes aux mégapoles portent en elles leur propre dépassement. Dès lors, une logique donnant la primauté à la qualité de l?environnement et au confort de vie est envisageable. Mais alors, la question de la différenciation entre l?urbanisation des pays développés et des autres se pose.

 Pour répondre aux défis de demain, il convient de prendre un certain nombre de mesures et de précautions. Tout d?abord, je suis convaincu de l?importance de la spécialisation économique. Celle-ci ne correspondra pas à la division internationale du travail classique des manuels scolaires mais à la spécialisation des villes sur un savoir-faire précis, qui en fera des lieux d?excellence au niveau mondial. Cette idée a d?ailleurs été reprise par la DATAR lorsqu?elle a défini les pôles de compétitivité. A ce titre, la candidature de l?Ile-de-France a été retenue sur un certain nombre de dossiers. Au final, il faut délaisser les stratégies « attrape-tout » au profit de la spécialisation. Entre Séoul et Shanghai, soit deux mégapoles de croissance comparable, c'est la seconde qui a acquis l?image de grande ville car elle a su valoriser sa spécialisation. La gouvernance constitue le second sujet clé. Dans ce domaine, l?organisation du grand Londres est exemplaire. En revanche, la région londonienne située au-delà de ce centre urbain ne témoigne pas de la même efficacité. Le sociologue américain Robert Hart l?avait parfaitement résumé : « la ville n'est pas une simple agglomération d'hommes et d?équipements, c?est un état d?esprit ». Prévoir l?évolution des mégapoles à l?horizon 2030 est un sujet d?avenir majeur.

Les mégapoles, véritables « machines de croissance »

Pierre VELTZ

Sociologue, ancien directeur de l?Ecole nationale des ponts et chaussées

Au-delà d?une approche strictement sociologique, je souhaite partager avec vous quelques idées générales.

I. Les mégapoles sont désormais les principaux moteurs du développement

Les très grandes villes sont devenues les moteurs principaux de la croissance et du développement, dans les pays développés au moins. Cette évolution n?a pas toujours été évidente. En effet, les grandes villes ont souvent été perçues comme étant des lieux de consommation et de pouvoir, des structures parasitaires entretenues par le reste du pays en quelque sorte. Cette vision prévalait aux débuts de l?économie politique. Elle reste présente dans la mentalité française.Pourtant, elle est totalement fausse : le PIB mondial est d'abord produit dans les très grandes villes. En fait, les métropoles assurent l'articulation entre les économies nationales et l'économie internationale. Elles sont donc plus sensibles aux fluctuations de cette dernière. En toile de fond, émerge une structure transversale qui se superpose aux Etats-nations : il s'agit d'un réseau horizontal, un archipel de très grandes villes directement connectées entre elles. A ce sujet, le fait que les échanges entre très grandes villes croissent plus vite que ceux entre ces mégapoles et leurs arrière-pays est remarquable.Les arrière-pays deviennent donc des charges pour les grandes villes. Ainsi, l'Ile-de-France redistribue un tiers de son revenu aux autres régions. Si sa situation économique décline, tout le pays en souffrira. Les métropoles tirent les économies nationales vers le haut. Les métropoles ne sont pas uniquement les lieux physiques de la localisation des entreprises. Elles constituent de véritables « machines de croissance », en associant deux types d?effets positifs : ceux liés à la taille des marchés qu'elles constituent ainsi que des effets hors marché, des externalités positives plus difficilement saisissables sur le plan de l?analyse économique. Dans le système moderne de compétition économique, où l?acquisition d?avantages se fait au moins autant par la différenciation ou la recherche de qualité que par la compression des coûts, la création de valeur s?effectue surtout à l?interface. Fernand Braudel comparait les grandes villes aux transformateurs électriques. J?utiliserai pour ma part la métaphore du commutateur, ou du hub : les grandes villes sont des lieux qui facilitent les connections entre les diverses composantes économiques et sociales.

II. L'indispensable stratégie d'attraction des talents

Si l'offre d'emplois détermine les migrations des personnes à court terme, cette relation s'inverse à moyen terme. Les villes ne cherchent alors plus à attirer des activités mais des hommes, et en particulier, la « classe créative » qui concentre les talents. Certaines activités à valeur intellectuelle élevée sont mobiles. Dans le même temps elles cherchent à s'inscrire dans un lieu physique. Ainsi, même Linux a eu besoin de se fixer dans l'université d'Oregon pour y installer son hub. Au final, les stratégies d'attraction des talents s'avéreront donc déterminantes. Je voudrais, à ce propos, profiter de cette tribune pour vous transmettre un message : l'Ile-de-France ne mène pas de politique d'attraction des étudiants des pays émergents les plus brillants. Or ce type de politique représente un investissement peu couteux eu égard aux bénéfices attendus en termes d'image. L'accueil francilien des étudiants étrangers est tout à fait catastrophique.

III. Les mégapoles concentrent aussi les inégalités économiques et sociales

Les inégalités majeures ne sont plus interrégionales, elles sont présentes à l?intérieur même des grandes agglomérations. Parallèlement, il faut constater que les difficultés rencontrées par les classes moyennes sont de plus en plus importantes, notamment en raison des prix du logement.

En conclusion, nous devons reconnaître que la question de la mobilité est au coeur de la dynamique métropolitaine. En effet, la raison d?être de la métropole est de garantir l'accessibilité du plus grand nombre au maximum de possibilités, ce qui suppose la mobilité. Aujourd?hui, cette dernière est principalement individuelle, symbolisée par le téléphone portable. Elle est également diversifiée et asynchrone. Pourtant, cette mobilité triomphante ne doit pas se matérialiser par l?étalement démesuré. Enfin, la mobilité, qui favorise a priori le brassage social, peut aussi, à l?opposé, constituer le moyen de la recherche de l?entre-soi à l'intérieur de communautés électives. Au final, le visage de la mégapole de demain dépendra donc de nos choix politiques.

Erik IZRAELEWICZ

Vous utilisez indifféremment les termes de ville, métropole, mégapole et mégalopole. Quelles est la différence entre eux ?

Pierre VELTZ

J?ajouterai que le terme « métapole » a même été inventé. Il est vrai que j?emploie tous ces termes indifféremment. Il existe de très grandes villes qui suivent des modèles d?organisation différents. Certaines sont très concentrées, c?est le cas de l?agglomération francilienne, quand d?autres sont plus étalées comme en Italie du Nord. Enfin, il existe des formes intermédiaires entre les deux, telles que Los Angeles. Au final, pour reconnaître une très grande ville, le facteur pertinent est la somme des ressources et des marchés auxquels il est possible d?accéder en une journée. Ainsi, dans le cas français, on peut presque évoquer une agglomération unique, grâce au TGV et à l?articulation entre les moyens de transport et de communication.


Donner la priorité à la périphérie

Roland CASTRO

Architecte

Monsieur Veltz a évoqué de nombreux éléments. Si nous traçons un parallèle avec le débat qui avait animé le monde soviétique, sur les avantages respectifs de l?agriculture intensive et de l?agriculture extensive, l?urbanité insupportable, comme en Ile-de-France, est celle qui s?apparente le plus à la logique de l?agriculture intensive. En revanche, si l?on met l?accent sur la mobilité, l?extension de l?urbanité est possible si elle suit la logique du réseau.

Je ne suis pas un futurologue, je pense que les personnes peuvent réellement influencer leur avenir et qu'aucun scénario n?est figé. Je connais un peu l?Amérique latine. A Sao Paulo ou à Rio de Janeiro, toutes les paniques dont les grandes villes sont entourées s'avèrent souvent sans fondement. A Rio de Janeiro, par exemple, les urbanités des favelas et celles des quartiers aisés s?opposent. Pourtant, une forme d?urbanité supportable s?insère partout.

La région parisienne constitue un sujet métropolitain très intéressant. La pauvreté et l'exclusion y côtoient la richesse. Le lien social y est particulièrement détérioré. Toute la « misère du monde » décrite par Pierre Bourdieu se concentre dans de grands ensembles éloignés de Paris qui s'apparentent à des impasses. Ce schéma typiquement français a fait la preuve de son inefficacité. Il a détruit les espaces. La question des grands ensembles a été totalement ignorée. Sartre a refusé le prix Nobel à cause de l'apartheid en Afrique du Sud mais ignorait ce qui se passait en banlieue. De fait, le silence des intellectuels montre combien le monde des grands ensembles a été longtemps idéalisé et perçu comme parfaitement égalitaire. Pourtant, les habitants qui demeurent dans les grands ensembles sont les classes réellement reléguées qui n'ont pas eu les moyens d'en partir.

Souvent, les journalistes écrivent que le décor y produit la misère. En fait, c?est la misère qui a trouvé son décor. Dans les grands ensembles, l?espace est panoptique et la promiscuité règne, chacun est placé sous le regard de l?autre. Soixante ans avant ce modèle, les HBM (habitations bon marché) constituaient un modèle d?habitat ouvrier esthétique et intelligent. Les cités jardins des années 20 et 30 sont également plus harmonieuses que les grands ensembles. Le taux de rotation qui avait cours dans ces habitations le prouve. Le Corbusier s?est trompé : sa vision hygiéniste ne s'est pas avérée opératoire car la ville « hyper-aérée » n?est pas une ville ; elle constitue plutôt une enclave.

Nos modèles continuent de privilégier le centre de manière obsessionnelle, notamment dans la définition des schémas de circulation. Pour changer cet état de fait, j?avais proposé au Président Mitterrand de construire la Grande Bibliothèque où se trouve aujourd'hui le Stade de France, afin de juxtaposer la mémoire du monde à un quartier difficile de Saint-Denis. De même, je souhaitais que l'Opéra Bastille soit construit en banlieue. Enfin, je propose maintenant de déplacer tout l?appareil d?Etat au long d'une ligne circulaire de tramway afin de mettre en place une centralité périphérique.

Quoi qu'il arrive, le remaillage du territoire est indispensable. A ce sujet, je voudrais évoquer le Paris haussmannien. Haussmann n'a pas uniquement conçu son modèle d'urbanisme dans le but d'établir des conditions efficaces à la répression des révoltes populaires. A contrario, le Paris du Second Empire dénotait une véritable volonté d?oeuvrer en faveur de l'égalité urbaine. Le Second Empire a ainsi permis la création de la place de l'Etoile comme celle de la place de la Nation. Les plus beaux jardins d?Alphand, tels les Buttes-Chaumont et Montsouris, ont été aménagés dans des quartiers ouvriers. Pourtant, le Paris du XIXème siècle était un lieu d'extrême violence entre classes.

 Le Paris haussmannien est une réussite. Aujourd'hui encore, tout le monde cherche à s'y installer. Toutefois, au-delà de cette zone haussmannienne et de celle des HBM, une fois passée une mince frange faubourienne, les cités, ces poches tragiques, apparaissent, alors que l'absence d'un maillage latéral est criante. Le projet de grand tramway pourrait contribuer à rassembler ces quartiers difficiles, et quarante communes au total, afin de créer des réseaux d?équipements. François Mitterrand avait cherché à laisser sa touche royale à Paris. Pourtant, la priorité doit aller à la périphérie. Le plus important, y compris sur le plan économique, c?est que la République reprenne sa place aux dépens de la stratégie du grand ensemble. Il nous faut opter pour la polycentralité dans la métropole. C'est une démarche compliquée ; cent roitelets s'y opposeront. Quand bien même, le tramway devra être réalisé, coûte que coûte. Il est dramatique d'attendre que des émeutes éclatent avant de penser ces questions, mais la métropole n'est pas une horreur garantie. L?intensité d?une ville-monde, le brassage culturel qui s'y opère, peuvent s?avérer magnifiques. Pour que les quartiers deviennent mixtes, nous devons les rendre attractifs et les embellir, au terme d'un vrai débat public.Tel est le moyen de la mobilité, à laquelle les milieux économiques sont si attachés. L'air de la ville rend libre. La métropole est un roman qui vaut la peine de mener la bataille de la cohésion nationale, afin de recréer une belle ville pour tous.

Erik IZRAELEWICZ

Vous avez stigmatisé les grands ensembles, typiques d?un mal français. Pourtant, tous les pays connaissent le même type de problèmes. Quelles sont, selon vous, les métropoles mieux organisées que les nôtres ?

Roland CASTRO

Les mêmes éléments ethniques ou culturels sont effectivement présents ailleurs qu?en banlieue parisienne. Pourtant, la cité exerce bel et bien une influence sur les comportements. A Paris, l'urbanité est remarquable et le vote en faveur de Le Pen est faible. Dans les cités, on s'abstient de voter ou alors, on vote pour Le Pen. La cité est un endroit où les femmes ne peuvent pratiquement pas circuler librement. Elle enferme les habitants dans une certaine image, elle les « scotche » littéralement.


Table ronde

Participaient à cette table ronde :

Pierre MANSAT, adjoint au maire de Paris, chargé des relations avec les collectivités territoriales d?Ilede-

France

>Michel VALACHE, vice-président de la délégation des Hauts-de-Seine de la CCIP, membre du Conseil

d'administration du pôle de compétitivité « Ville et mobilité durables », président directeur général de SARM-Veolia Propreté

>Xavier FELS, directeur des relations extérieures de PSA Peugeot Citroën, secrétaire général de l?Institut

pour la Ville en mouvement

>Jean-Marc CASTAIGNON, directeur général de l?immobilier d?exploitation à la Société Générale

Pierre MIRABAUD, délégué à l?aménagement du territoire et à l?action régionale (DATAR)

Cette table ronde était animée par Erik IZRAELEWICZ, directeur adjoint de la rédaction des Echos.

Erik IZRAELEWICZ

Je propose à Pierre Mansat d?aborder le problème de la gouvernance.

Pierre MANSAT

Je préfère l'expression « gouvernement démocratique » au terme de gouvernance, car elle correspond mieux à la philosophie politique française. Ceci étant dit, ce dernier étant aujourd?hui consacré, je l?emploierai pour la clarté du propos.

La gouvernance est nécessaire, parce que la vie des gens est faite de déplacements, d'imbrication extrême et de mobilité. Elle ne correspond plus aux échelons administratifs existants, même si ceux-ci ne sont pas périmés pour autant. Tous les jours, 800 000 habitants de la banlieue vont travailler à Paris. Dans le même temps, un tiers des actifs parisiens exercent leur profession hors de la capitale. Nous devons nous adapter à ces évolutions. La mobilité et l?imbrication sont extrêmes. Toute politique mise en oeuvre dans un territoire en affecte d?autres. Les politiques de déplacement, par exemple, doivent ignorer les limites administratives. Ainsi, des collectivités mettent en oeuvre des politiques de concurrence alors que le bon fonctionnement de la métropole exige plutôt de la complémentarité et de l?émulation.

Par ailleurs, la question de la relégation reste primordiale. Dans « l?hypercentre », au coeur même de la métropole, vivent des personnes aisées qui savent profiter du système et des personnes pauvres qui subsistent. Entre ces deux catégories, la masse des salariés qualifiés, victime des prix de l?immobilier, est exclue du centre.

Nous devons donc inventer une gouvernance. Pour ce faire, il nous faudra aller au-delà des représentations habituelles, forgées par des rapports historiques d?opposition entre la ville de Paris et le reste de l?agglomération. En outre, il conviendra de tenir compte de la complexité des distinctions politico-administratives entre communes, région, départements et structures intercommunales.

Nous devons modifier le rapport existant entre Paris et le reste de l?agglomération afin de créer les conditions d'émergence d'un véritable projet métropolitain. Les Italiens parlent de « scène politique ». Il convient en effet de réunir les élus concernés sur une même scène politique, sous la forme d?un partenariat. Ce nouvel espace, sans tensions, domination ni craintes de domination, devrait permettre d?organiser le débat préalable à la définition d'un projet métropolitain entre les acteurs économiques, les transporteurs, les syndicats et les centres de recherche, entre autres.

Dans cette optique, Paris a proposé de travailler à l'émergence d'une « conférence métropolitaine ». Il semble que ce terme emprunté à la DATAR ne satisfasse pas toutes les parties. Pourtant, l'emploi du mot « conférence » souligne que l?espace de débat qui est proposé résulte d'une dynamique moins formelle qu?un processus institutionnel.

Erik IZRAELEWICZ

Roland Castro, quelle est votre réaction à ces propos ?

Roland CASTRO

Un véritable coup de force citoyen est nécessaire. La question du grand Paris doit s?immiscer dans le débat public. J'ai conscience que cette démocratisation est difficile. Je pense en la matière à l?exemple des Halles, au centre de Paris : le projet d?aménagement retenu consiste à satisfaire en priorité les riverains alors que les personnes fréquentant cet endroit sont avant tout des banlieusards.

Par ailleurs, je souhaite insister une fois encore sur le projet de tramway périphérique. Ce projet est une nécessité absolue. Il devra être réalisé, quelles que soient les personnalités politiques chargées de le mener à bien. Le schéma directeur actuel ne rend pas compte de la poésie du grand Paris. Retrouvons l'esprit des conventionnels qui avaient demandé aux artistes de réaliser des plans. Certes, l?approche institutionnelle est indépassable. Pourtant, elle doit mieux intégrer la participation citoyenne. Si j?étais un homme politique, je n'aurais pas peur de porter publiquement toute la poétique du projet de grand tramway périphérique.

Michel VALACHE

Je retiens de l'intervention de Monsieur Castro ses propos sur la prise de conscience des problèmes et la médiatisation en cours. En tant que membre de la Chambre de commerce et d?industrie de Paris, je souhaite réaffirmer notre intérêt pour les thèmes évoqués aujourd?hui. Nous souhaitons être un véritable acteur du changement social afin que cette fantastique région qu?est l?Ile-de-France ne soit pas en péril. Quoi qu'il arrive, le citoyen doit être placé au coeur du système, en rappelant qu?il est à la fois travailleur, consommateur, usager, contribuable, etc. Les outils pour assurer sa participation existent : le SRDE (Schéma régional de développement économique) et le SDRIF (Schéma directeur de la région Ile-de-France), ainsi que le pôle de compétitivité. Dans le cadre du SRDE qui régule la coopération de l'ensemble des acteurs économiques, nous avons défini un certain nombre d'enjeux : l'attractivité du territoire pour les entreprises et la population, la concentration des activités en croissance et le maintien du leadership de la région-capitale. Enfin, nous devons mettre en place les conditions d'une compétitivité accrue et d?une croissance durable, même si elle est parfois en contradiction avec les objectifs pressants de résultat à court terme des entreprises. Mesurer les progrès de la gouvernance et l'efficacité de l'emploi des aides économiques attribuées s?avère également capital. La Chambre de commerce et d?industrie de Paris se propose de contribuer à ces évaluations.

Le SRDE référence quatre thèmes d?action principaux :

· l'innovation, la recherche et les pôles de compétitivité L'Ile-de-France est une région phare dans les domaines de la recherche et de l?innovation mais son avance se réduit. Il faut y remédier.

· le logement et l'emploi L'adéquation entre l?offre et la demande d?emploi doit être facilitée. En outre, une réflexion sur le niveau de vie en Ile-de-France doit être engagée.

· la création et la transmission d'entreprises Dans les dix prochaines années, 800 000 entreprises devraient changer de propriétaire. Actuellement, une partie de ces transferts se traduit par une fuite de structures hors de notre région.

· l'immobilier, les zones d'activité économique et les infrastructuresCette partie concerne la mise en place des infrastructures nécessaires à la compétitivité économique, en termes de transports ou de réseau de télécommunications à très haut débit, notamment. Notre métropole francilienne doit tirer profit de la compétition mondiale. Pour ce faire, nous suivons quatre principes fondamentaux :

· s'adapter à la globalisation des flux et de l?économie par l?implantation de nouveaux centres de commandement ;

· développer une image positive par le tourisme et la culture, ainsi que par l'organisation de congrès et salons de dimension mondiale ;

· garantir une formation de premier choix ;

· accueillir des évènements d?envergure au niveau international, telle qu?une exposition universelle.

En outre, la région doit contrer le déplacement du centre de gravité de l?Europe vers l'est en facilitant son accessibilité depuis l'extérieur, afin d'éviter sa marginalisation. Enfin, elle doit organiser ses rapports avec les autres territoires français sur le mode de « l'alliance coopérative ».

C'est-à-dire que les régions françaises ne doivent pas entrer en concurrence mais avoir une vision mondiale. Ainsi, il nous faut structurer l?espace par un maillage territorial permettant de connecter tous les schémas territoriaux.

Erik IZRAELEWICZ Monsieur Fels, pouvez-vous nous présenter l'Institut pour la Ville en mouvement ?

Xavier FELS Il s'agit d?une fondation créée en 2000 par PSA afin de trouver des solutions innovantes parmi diverses expériences urbaines de mobilités. La RATP, Monoprix et la ville de Stuttgart, notamment, participent à notre conseil. Nous cherchons à approfondir nos connaissances sans tabous. En tant que constructeur automobile et « expérimentateur multimodal », j' adhère aux propos de Pierre Veltz : la mobilité prime dans les métropoles modernes. Sur cette question, je porte à la fois un regard optimiste et prudent. Il existe en effet le risque que la mobilité ne soit pas la même pour tous. Pourtant, cette dernière devrait être un droit central qui donne accès aux autres droits comme le droit au travail, aux loisirs, à la culture et à la santé. J'insiste également sur la nécessité de la fin de l?illusion consistant à penser que les progrès de mobilité ne sont pas liés à la croissance économique. Nous devons être plus mobiles, la modernité l?exige. Dans le même temps, la mobilité doit être durable et respectueuse de l'environnement. Enfin, nous devons analyser cette dernière de manière scientifique, par un benchmarking des expériences internationales.

Erik IZRAELEWICZ Jean-Marc Castaignon, pouvez-vous évoquer l'aspect immobilier lié à notre débat ?

Jean-Marc CASTAIGNON

La Société Générale a décidé il y a dix ans de quitter Paris pour La Défense. Je dois constater aujourd?hui que ce choix d'implantation s'est avéré tout à fait satisfaisant. Nous sommes desservis par la ligne A du RER qui fonctionne correctement en continu. Nous, entrepreneurs, avons besoin de transports de qualité. A ce sujet, je me demande comment il est possible que la ligne Eole ne soit pas encore mise en service ou que la liaison express avec l'aéroport Charles de Gaulle n'existe toujours pas. Cela est inconcevable.

Erik IZRAELEWICZ Je propose à Pierre Mirabaud de réagir.

Pierre MIRABAUD Le gouvernement a nouvellement mis l'accent sur la compétitivité des territoires, qui n'implique en aucun cas une compétition. Nous sommes tous conscients que l'affirmation d'un grand Paris constitue un atout pour notre pays et pour l'Europe dans la compétition mondiale. Pourtant, cela ne va pas de soi ; tous les jours, des efforts sont nécessaires car la ville connaît un certain nombre de contraintes spécifiques.

Une mégapole doit offrir des opportunités à tous ses habitants. Or c?est grâce au véritable développement durable que nous y parviendrons. Ce développement suppose notamment la mixité sociale qui constitue un facteur de performance.

Il est vrai que la mobilité est un enjeu de la compétition mondiale. Pour autant, la qualité des espaces et de l'environnement méritent également que l'on y porte attention afin que nos métropoles restent attractives sur le plan l'international.

Par ailleurs, je veux insister sur la nécessaire complémentarité de la capitale avec les autres métropoles de taille différente, qu'il nous faudra garantir. La nouvelle Délégation interministérielle à l'aménagement et à la compétitivité du territoire (DACT) a lancé un appel à la coopération métropolitaine qui a rencontré un large succès. Son objectif est de faire prendre conscience aux acteurs concernés qu'il existe des projets communs. Tous n?ont pas le même degré de prise de conscience de ce phénomène. Nous devons privilégier les schémas d'aménagement cohérents effectués en commun, les équipements

De la salle Je suis conseiller sur les questions liées à l’environnement. J’ai travaillé dans un groupe allemand qui a choisi de s’implanter en province plutôt qu’à Paris, en raison de la qualité de la vie et des transports. Comment expliquer la pauvreté croissante de l’Ile-de-France ? Les coûts engendrés par la perte de mobilité et la faible offre de transports ontils été chiffrés ? Quelle serait l’enveloppe financière indispensable pour rattraper le retard que connaît la région ?

Pierre VELTZ La question des classes moyennes est primordiale. Cela étant dit, il ne faut pas être défaitiste. Paris a des ressources extraordinaires. Quant au développement de la province, il constitue à n’en point douter un phénomène positif. En revanche, il existe des personnes qui demeurent en Ile-de-France parce qu’elles ne peuvent pas en partir. Du côté des classes moyennes, le calcul en termes de coûts et d’avantages s’avère négatif pour de nombreuses personnes. Or une économie aussi diversifiée que celle de l’Ile-de-France ne peut fonctionner convenablement si elle n’est servie que par des personnes très riches et très pauvres. En ce qui concerne la question du financement du développement, je ne suis pas en mesure de vous répondre. Enfin, je souhaite évoquer le secteur du bâtiment. Il s’avère être un secteur clé au même titre que les transports. La mobilité est irréversible. En outre, elle s’accompagne d’une révolution latente de la construction et du bâtiment. L’immobilier devient de plus en plus un actif « titrisé » à l’instar des autres catégories d’actifs. De plus, les évolutions du secteur du bâtiment sont porteuses de questions environnementales, au même titre que l’évolution des transports.

 Xavier FELS Il existe des solutions relativement simples. L’une d’entre elle consiste à mieux utiliser le temps et à tenir compte des situations spécifiques aux différentes heures de la journée. A Lisbonne, quand le bus arrive, une voie réservée jusque là virtuelle se crée, délimitée par des plots électriques. La RATP, qui est membre du conseil de notre institut, a mis en avant dans cette instance la possibilité d’organiser un transport à la demande en fin de réseau. Ainsi, il devrait être possible de mettre en oeuvre des actions efficaces et peu coûteuses. Je pense notamment à des mesures facilitant l’usage des taxis. 13 De la salle Je travaille pour Publicis Consultants. Les grandes métropoles mondiales se rencontrent-elles dans des instances en vue d’échanger sur les problèmes qui les préoccupent et d’établir des modes de collaboration ?

Pierre MANSAT A titre d’exemple, la région parisienne a été l’initiatrice du réseau Metropolis réunissant des métropoles européennes, américaines et asiatiques. De la salle Je suis architecte. Je souhaite revenir sur l’aspect territorial. A ce sujet, nous avons abordé le thème des transports, ceux du bâtiment et du développement durable, mais nous n’avons pas mis en avant la notion de densité. Pourtant, ce terme est au coeur du débat sur le SDRIF. La densité me semble éminemment porteuse d’espoir. Elle permet de rapprocher les exclus des autres, de réaliser des économies de transport, d’optimiser la construction des bâtiments et de limiter le gaspillage. La densité peut devenir le moyen de l’accessibilité aux loisirs et au travail. Pierre Mansat, il me semble que nous sommes complexés et que la capitale se sclérose. Force est de constater que nous affrontons mal la concurrence internationale.

Pierre MANSAT Au lieu de parler de densité, je préfère évoquer la « ville compacte », qui est en même temps écologiquement durable, productive et agréable. Paris est déjà dense. La qualité de vie d’une ville dépend aussi des équipements qui y sont présents. Or il faut des terrains pour les construire. A Paris, la disponibilité en terrains s’avère assez faible. Je souhaite ajouter que la poétique du tramway évoquée par Roland Castro ne répond pas aux enjeux contemporains qui, par leur importance, appellent une réponse plus lourde afin de développer l’offre de transports de banlieue à banlieue. Nous estimons que les besoins de première nécessité en matière de transport représentent un investissement de l’ordre de 3 milliards d’euros.

Pierre SIMON Monsieur le Ministre, je vous remercie d’avoir accepté de venir conclure ce colloque. Je remercie également Monsieur Izraelewicz et les divers intervenants pour leur participation. L’objet principal du colloque était de prendre du recul sur le sujet des mégapoles, au moment où des décisions importantes pour l’avenir doivent être prises. Au final, nous en sommes vite revenus à la problématique parisienne, alors que la question centrale concernait la place de Paris dans le monde de 2030. L’élaboration du SRDE et du SDRIF nous donne l’occasion d’aborder ces sujets. Ces schémas constitueront-ils des documents de référence ? Comme nombre d’entre vous l’ont relevé, nous avons besoin de développement économique pour répondre à la crise des banlieues. La chance de l’Ile-de-France, par rapport à Londres notamment, réside dans sa diversité. Londres est principalement un grand centre financier. En revanche, son tissu industriel est moins important que celui de l’Ile-de-France. Le coeur de Paris regroupe des activités classiques comme celles dites de « haut tertiaire », soit du conseil, de l’informatique, de la recherche, du tourisme et des activités culturelles. Nous devons faire de notre mieux pour conserver ces atouts. La diversité économique régionale constitue un avantage certain en cas de retournement de conjoncture. Dans le même temps, nous devons entretenir la force du coeur de la mégapole francilienne, sans quoi la région ne sera pas suffisamment compétitive. Je préside une chambre de commerce héritière du département de la Seine. Lorsque celui-ci a été divisé en quatre, sa chambre de commerce a conservé les mêmes attributions sur le plan territorial. Ainsi, notre assemblée générale est chargée d’élaborer des compromis acceptables par quatre départements. Il faut admettre que toute position ne concernant que Paris ne saurait être réaliste. Par conséquent, il nous faudra mettre en place une nouvelle organisation administrative qui satisfasse ce besoin de concertation élargie.

Par ailleurs, l’ambition économique passe effectivement par la résolution des problèmes de transport et d’infrastructures. Quid d’Eole ou des noeuds entre lignes de TGV ? Nous devrons débattre des différentes solutions envisageables. Enfin, se pose le problème de la localisation des activités des entreprises et des logements. Monsieur le Ministre, je suis un Parisien qui n’est pas né à Paris. J’ai passé vingt ans dans cette ville en tenant un discours d’anti-parisianisme primaire. Aujourd’hui, je me réjouis que l’aménagement du territoire ait changé, en tenant compte de cette évidence : on ne s’enrichit pas aux dépens des autres, c’est l’enrichissement général qui profite à tous.

Dominique PERBEN Ministre des Transports, de l’Equipement, du Tourisme et de la Mer

 

 

 

Nous allons connaître dans les 25 prochaines années le développement de mégapoles qui constitueront les creusetsndes civilisations de l’avenir. Votre initiative consistant à réunir un architecte, un sociologue, des entrepreneurs, des politiques permet de faire naître un dialogue entre les différents acteurs publics, les entreprises et les métiers concernés par les questions urbaines. La grande question d’urbanisme qui nous est posée est la suivante : comment, par de l’audace, de l’écoute et des partenariats, fabriquer des grandes villes humainement satisfaisantes ? Serons-nous encore capables, en Europe, de bâtir de grandes villes harmonieuses et respectueuses de l’environnement, abritant des relations sociales et un vivreensemble tels, que ces métropoles donnent envie d’y vivre ? La densité ne constitue sans doute ni un bien ni un mal en soi. Mais évoquer cette notion a le mérite d’ouvrir un débat intéressant. Les mégalopoles de demain seront des creusets de civilisation, des laboratoires et des zones de création de richesses. Quelles sont celles qui réussiront ? Certainement celles qui seront capables de proposer des modes de vie correspondant aux désirs de leurs habitants.Quoi qu’il en soit, c’est dans les grandes métropoles que les réponses de la civilisation européenne aux grands défis du futur seront apportées. Il s’agira ainsi d’être capable d’ouvrir notre société sur l’extérieur, d’accueillir les migrants et de créer, à partir de la diversité, une culture et des m

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