27 Juin 2009
| 26/06/2009 | 11:59 |
Patrick Jarry - maire de Nanterre, conseiller général des Hauts-de-Seine, président de l'Etablissement public d'aménagement Seine-Arche (Epasa), administrateur de l'Etablissement public d'aménagement de La Défense (Epad) - souligne dans son courrier solennel à Nicolas Sarkozy combien sont devenus "obsolètes" les plans de relance et d'extension du quartier d'affaires de La Défense, établis "sans aucune concertation", mais surtout, avant le Grenelle de l'environnement, avant la crise et avant le discours du président de la République sur le devenir du territoire de la métropole parisienne. Il demande que les populations et les villes du secteur soient associées à une véritable réflexion pour repenser l'avenir de l'Ouest parisien.
Voici l'intégralité de ce courrier.
" Monsieur le Président,
Comme toutes les villes de la région capitale, Nanterre souhaite être pleinement partie prenante du débat actuel concernant le devenir de l'Ile-de-France, et tout particulièrement celui de l'Ouest parisien.
C'est tout le sens du conseil municipal extraordinaire qui s'est tenu le 23 mai dernier et qui a rassemblé des centaines d'habitants. A cette occasion, les élus municipaux ont pu prendre connaissance de l'ensemble des projets en cours impactant le territoire communal. Ils ont réaffirmé leur volonté que Nanterre soit respectée et associée.
Cette exigence, largement partagée par toutes celles et tous ceux qui vivent, travaillent et étudient dans notre ville, se fonde sur l'expérience. Cela fait en effet des années que nous portons l'idée que cette grande métropole parisienne n'a aucun avenir si elle continue d'être aussi ségrégative et aussi peu durable. Nous l'avons dit dans les débats internationaux conduits autour des villes, lors des échanges qui ont créé Paris métropole, ou encore pendant la préparation du Schéma directeur d'aménagement de la région Ile-de-France (Sdrif).
De ce point de vue, j'ai suivi avec beaucoup d'attention votre récent discours au sujet du Grand Paris, prononcé le mercredi 29 avril dernier, depuis la Cité de l'architecture et du patrimoine. Vous y insistez sur l'idée d'unir la ville, de combattre les ségrégations spatiales, sociales, culturelles...
Comment ne pas partager une telle ambition ?
Mais en même temps, comment ne pas voir qu'ici, dans cet Ouest parisien, c'est pour l'instant tout le contraire qui est mis en œuvre ?
Vous appelez à désenclaver les territoires ?
Mais l'Etat ne tient pas son engagement pris il y a maintenant dix ans, de couvrir l'échangeur A14/A86, véritable coupure entre plusieurs morceaux de ville.
Et à ce jour, nous n'avons pas de garanties que la réalisation d'Eole à l'Ouest, qui passe par Nanterre, se fasse sans nouvelle dégradation de l'espace urbain, avec les conséquences pour des milliers d'habitants.
Vous parlez de métissage ?
Mais, ici, autour du quartier d'affaires, les ségrégations sociales, urbaines, économiques, culturelles n'ont jamais été aussi fortes et aussi visibles.
Vous parlez de gouvernance partagée, de privilégier le projet ?
Mais, ici, un décret est en préparation chez le préfet de région, pour imposer un nouvel établissement unique en lieu et place des actuels Epasa et Epad, et des plans circulent pour étendre encore le périmètre de l'opération d'intérêt national sur Nanterre.
Serions-nous alors dans un territoire d'exception, qui échapperait à la démarche annoncée concernant le Grand Paris ?
Ce serait inacceptable et pour tout dire totalement contre productif...et pas seulement pour Nanterre.
Car, Nanterre n'est pas le seul territoire qui a été impacté par la manière dont s'est développé La Défense. Ce quartier d'affaires construit à part, sans liaisons véritables aux villes qui l'entourent. Ce quartier d'affaires dont l'avenir interroge, alors que notre planète connait l'une des plus grandes crises économiques et financières de son histoire ainsi qu'un défi environnemental sans précédent.
Dès lors le temps n'est-il pas enfin venu de réinterroger en profondeur ce modèle de développement ?
D'admettre que le « plan de renouveau de La Défense » et tous les projets d'extension du quartier d'affaires, élaborés avant le Grenelle de l'environnement et avant le déclenchement de la crise, sont désormais caducs ?
D'accepter un véritable débat, sans a priori et sans exclusion, qui associe toutes les populations concernées et tous leurs élus locaux ?
Travaillons à cette échelle, réfléchissons au devenir du quartier d'affaires, à son lien aux communes avoisinantes. Réexaminons les centaines de milliers de mètres carrés supplémentaires envisagés. Repensons les équilibres sociaux économiques. Réparons les territoires et les quartiers les plus abimés. Favorisons dans toutes les communes la mixité des populations et la mixité des activités. Recherchons le développement de nouveaux liens avec les universités et tout le secteur de la recherche. Donnons toute sa place à la vie urbaine, à la culture, aux liens sociaux.
Je n'ai moi-même, avec toute la majorité municipale nanterrienne, pas d'autre objectif que de contribuer à cette évolution, quand je propose que les élus, les associations et les habitants des six villes les plus directement concernées que sont Courbevoie, La Garenne-Colombes, Puteaux, Nanterre, Suresnes et Rueil, travaillent ensemble pour essayer de déterminer les axes d'un projet commun de territoire.
Vous le voyez, Monsieur le Président, les élus de Nanterre ont de l'ambition pour leur ville, pour ses habitants, ses salariés, ses jeunes, ses étudiants. Ils ont aussi des propositions pour l'Ouest parisien et pour toute la métropole.
C'est cet état d'esprit qui me conduit aujourd'hui à vous demander de me recevoir avec une délégation d'élus nanterriens.
Dans l'attente d'une réponse positive de votre part,
Je vous prie de croire, Monsieur le président de la République, à l'expression de mes salutations les plus respectueuses,
Patrick Jarry"