24 Juin 2015
Des centaines de pages de la nouvelle loi pourraient finir à la poubelle.
Et laisser place à une réforme taillée sur mesure pour Claude Bartolone.
TOUT ça pour ça? Après deux ans
de discussions homériques, des
centaines de réunions, la rédaction
de milliers de pages de rapports
et un interminable débat parlementaire
qui a accouché, dans la douleur,
de deux lois d'une complexité et d'une
longueur abracadabrantesques, le projet
du Grand Paris pourrait bien finir
à la poubelle. Et laisser place à un
simple accroissement des compétences
du conseil régional d'Ile-de-France.
L'Elysée et Matignon avaient imaginé
un Grand Paris couvrant la capitale
et sa proche banlieue. Et monté
une invraisemblable usine à gaz. Un
« Conseil de la métropole» et 19 « établissements
publics territoriaux » (sorte
de communautés de communes) se seraient
ainsi ajoutés aux 130 communes,
aux 4 départements et au conseil régional
préexistants ...
Jusqu'à ces derniers jours, l'affaire
semblait réglée. Malgré la victoire de
la droite aux municipales, qui lui donne
mécaniquement la présidence du
Grand Paris, la réforme a continué son
petit bonhomme de chemin. Et la dernière
loi en discussion (intitulée en
toute modestie NOTRe, pour « Nouvelle
organisation territoriale de la République
») devait être adoptée par le
Parlement cet été. Mais l'entrée de
Claude Bartolone dans l'arène des élections
régionales a tout bouleversé
Couronne sur mesure
Le président de l'Assemblée a été désigné
tête de liste des socialistes, au
grand dam de Jean-Paul Huchon, le
sortant sorti. Du coup, Barto se verrait
bien ceindre la double couronne
de patron de l'Ile-de-France et du
Grand Paris réunis. Pour réussir ce
sacre, il a proposé à Hollande et à Valls
de bloquer la réforme en cours et d'élargir
le périmètre de la nouvelle métropole
à celui de la région tout entière.
L'Elysée et Matignon ont trouvé l'idée
excellente. Si la gauche gagne en décembre,
toutefois.
Mais la mise en musique de la manip
tourne au casse-tête ... Certes, la droite
francilienne - à commencer par sa chef
de file,Valérie Pécresse - ne peut guère
protester contre ce changement de pied,
puisqu'elle a toujours plaidé pour un
Grand Paris retaillé à l'échelle de l'Ilede-
France. Et qu'elle présiderait ellemême.
Mais il est impossible de suspendre
ou de ralentir le processus
législatif, car la loi NOTRe concerne
aussi les pouvoirs accordés à toutes les
autres régions. Difficile aussi de ré-
crire un texte qui arrive aujourd'hui
en fin de discussion ...
Pour sortir de ce pétrin, le gouvernement
a décidé de donner un peu de
temps au temps en retardant la mise
en place de la nouvelle métropole. La
question a été tranchée à l'issue d'une
réunion de crise qui a réuni à Matignon,
le 23 juin, Manuel Valls, Claude
Bartolone, Anne Hidalgo et quelques
barons et baronnes socialistes d'Ile-de-
France. Le baptême du Grand Paris
aura bien lieu le l"janvier 2016. Mais
il devrait se limiter à l'inauguration
d'une coquille vide. Les compétences
prévues par la loi ne lui seront transférées
qu'au 1" janvier 2017. Un délai
largement suffisant pour voter de nouvelles
lois et voir si l'ami Barto s'est
montré capable de rafler la mise ...
Hervé Lifran