16 Décembre 2021
Des archives de la guerre d’Algérie
& de l’accès aux archives publiques.
Dès la déclaration d’E.Macron le 13 septembre 2018 reconnaissant la responsabilité de la France dans l’assassinat de Maurice Audin dans le cadre d’un système d’enlèvement-torture-disparition, de nombreux historiens.nes ont demandé l’ouverture de toutes les archives. C’est indispensable
Pour comprendre l’annonce de la ministre de la Culture R. Bachelot il est nécessaire de décrypter quelques termes. Des archives de la guerre d’indépendance algérienne qui ne pouvaient être communiquées qu’après un délai de 75 ans vont être accessibles selon un principe de «dérogation générale». Cette disposition entraîne leur ouverture à toutes les personnes qui en font la demande. Un exemple: des archives qui auraient dû être accessibles librement seulement 75 après la date du dernier dossier du carton dans lequel elles sont conservées (soit 1962, 1962+75 =2037) seront visibles en 2022.
Seraient concernées les archives judiciaires, civiles et militaires, juridictions normales ou d’exception et les enquêtes de police. En France et en Algérie. Jusqu’en 1966. Les archives sont celles des ministères des Armées, de l’Intérieur, des Affaires étrangères, de l’outre-mer, départementales.
C’est une avancée très importante qui doit être saluée. Ces archives sont nombreuses, et chercheurs.ses, historiens.nes, citoyens.nes vont pouvoir explorer des pans entiers de la lutte contre les indépendantistes algériens et leurs soutiens: les rapports d’enquêtes, de perquisitions, d’interrogatoires, les minutes des procès, les individus impliqués dans le terrorisme de l’OAS et leurs complices…
Mais la déclaration de la ministre soulève plusieurs problèmes comme ses approximations à propos de la torture; outre qu’on en sait beaucoup à ce sujet, quelles sont les questions auxquelles les archives répondraient? Les tortionnaires laissent rarement un rapport écrit de leurs horreurs. Ce n’est pas dans les archives judiciaires que les victimes trouveront des réponses. Ce n’est pas bien de donner de faux espoirs. Et les archives de la justice militaire à Le Blanc [Indre] sont inaccessibles depuis deux ans. Il faut donc permette leur accès immédiat et organiser leur transfert dans un centre dédié.
Surtout le débat ne peut pas être circonscrit aux archives de la guerre d’Algérie, si cette dérogation générale est importante il faut voir plus large: ces deux dernières années, historiens, archivistes, juristes, citoyens ont lutté contre des dispositions très graves de fermeture de l’accès aux archives prises par le gouvernement. Empêchant la recherche et mutilant les libertés académiques. L’action du collectif «Accès aux archives publiques» a permis de les faire annuler. Mais le gouvernement a initié une réforme législative [Loi Prévention des Actes de Terrorisme et renseignement] qui ferme des pans entiers des archives, celles des services de renseignements.
Pierre Mansat, militant du droit à l’accès aux archives et de l’association Josette et Maurice Audin
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