L’actuel directeur des stratégies territoriales au Commissariat à l’égalité des territoires (CGET) met son exceptionnelle faculté de réflexion au service de l’Etat. Sans complaisance ni concession.
D’emblée, Hugo Bevort impressionne. Par sa faconde tout d’abord, sur des sujets aussi techniques et sensibles que le Grand Paris, la géographie économique de la France, voire du monde, ou encore la banlieue. Par sa volonté ensuite de dire les choses telles qu’elles sont et pas selon d’hypothétiques interprétations. Hugo Bevort n’aime ni les clichés ni les approximations. « L’analyse de ce qui fonctionne et ne fonctionne pas repose sur trop de clichés qui ne sont pas vérifiés », constate le directeur des stratégies territoriales au Commissariat général à l’égalité des territoires (CGET).
Hugo Bévort. © JGP
Pour lui, l’incapacité par exemple à résoudre les difficultés des banlieues provient, non seulement « du manque de générosité dans le regard que l’on porte sur ces territoires », mais aussi du fait que « l’on s’est privé de la capacité de les comprendre ». C’est tout l’enjeu de son rôle au CGET, sous l’autorité de Jacques Mézard, ministre de la Cohésion du territoire, « bien qualifier la situation et comprendre ce qui travaille le territoire, puis nourrir l’analyse » pour permettre au gouvernement de mettre en œuvre les politiques publiques adaptées.
Cette démarche intellectuelle guide son action au sein des cabinets et des administrations dans lesquels il travaille depuis dix ans, après un début de carrière dans l’enseignement dont quatre années au lycée Jacques Brel de La Courneuve (Seine-Saint-Denis) et deux à celui de Capponi en Italie. « J’ai toujours eu la chance de travailler dans des lieux où on ne faisait pas d’institutionnel, auprès de gens qui aimaient lire de la littérature scientifique, avaient le goût des mots et aimaient penser », se délecte cet agrégé d’histoire et ancien élève de l’ENA. « J’aime avoir le temps de la réflexion et gagner la bataille des idées. »
Changer de vie
C’est notamment auprès de Pierre Mansat à la ville de Paris, puis de Manuel Valls, alors Premier ministre, qu’il contribue à la réflexion sur le Grand Paris. Depuis qu’il a intégré le CGET en mai 2017, Hugo Bevort a pris de la hauteur, voire même de la distance, face à ce sujet « tellement compliqué qu’il devrait encore nous accompagner longtemps », assure-t-il. Sa mission désormais est « d’essayer de comprendre le Grand Paris dans le miroir des autres grandes métropoles mondiales » afin d’éviter d’en avoir une « vision provinciale ». Mais il doit aussi montrer comment les transformations du Grand Paris interrogent toute l’organisation de l’ensemble du pays.
Alors qu’il participe à la mise en œuvre de la controversée Conférence nationale des territoires devant créer un cadre de dialogue entre le gouvernement d’Édouard Philippe et les collectivités territoriales, Hugo Bevort s’est aussi découvert une passion pour la négociation, qu’il met en pratique dans les institutions européennes où il porte la position de la France sur le futur cadre financier pluriannuel. Mais déjà, cet amateur d’auteurs de haute volée (Thomas Bernard, Proust, Peter Handke dont son fameux Essai sur le fou de champignons) pense à son coup d’après.
« Dans quelques années, j’aimerais changer à nouveau de vie après huit ans dans l’enseignement, huit ans en cabinet, et presque autant dans l’administration », égrène le quadragénaire père de trois enfants, rejetant d’emblée toute ambition politique. Cet amoureux des errances dans les villes et les forêts, ne commençant jamais une journée sans un peu de jardinage, n’y trouverait probablement pas son compte.