Navré, mais les Pinçon-Charlot ne produisent plus une analyse convainquante de la sociologie parisienne

Dans Le Monde des Livres cette critique des pratiques des Pinçon-Charlot, qui correspond au profond malaise ressenti hier en écoutant Monique Pinçon Charlot aux débats de Le MondeCities. Malaise d'autant plus fort que j'ai partagé leurs ouvrages sur la grande bourgeoisie dans les années 90 et 2000, mais leur adhésion aux analyses populistes [ Oligarchie 1%\ peuple etc... ] et leur manque de rigueur [ c'est triste a dire] les decridibilisent énormément. Par exemple  les approximations sur l'évolution sociologique de Paris [ comparer 1954 avec 2019!; ignorer globalisation et metropolisation non maîtrisées, ignorer l'effort de production de logements sociaux depuis 2001, alors qu'il me semblent bien qu'ils avaient écrit dans les années 90 " la construction de logements sociaux à Paris  est la seule façon de lutter contre la gentrification", ignorer la dimension grandparisienne etc
Ma déception confirmée....

Le Monde des Livres :

Les Pinçon-Charlot, ex-sociologues

Définir la sociologie est une tâche délicate, à peu près infinie. Il est plus simple de dire ce qu’elle n’est pas. Quelqu’un qui se tient, par exemple, près d’une luxueuse brasserie parisienne pour observer la réaction des clients à la présence de « gilets jaunes » et ne les questionne pas, se contentant de noter ses impressions sans les confronter à une quelconque étude du terrain ainsi constitué : celui-là, à ce moment précis, est tout ce qu’on voudra, sauf un sociologue.

Cette scène du Président des ultra-riches, le nouvel essai de Michel Pinçon et Monique Pinçon-Charlot, spécialistes incontestables de la sociologie des élites françaises, auteurs, dans les années 1980 et 1990, de livres qui comptent, est pourtant l’une des rares qui aient quelque chose à voir avec la discipline qu’ils pratiquaient comme directeurs de recherche au CNRS avant leur retraite en 2007. Or elle cristallise comme les autres la mutation qu’a alors connue leur œuvre, passée de l’enquête à l’impressionnisme, de la critique à l’affirmation.

Devant la brasserie, les Pinçon-Charlot croient observer l’assurance imperturbable et le goût de l’entre-soi d’une bourgeoisie coupée du reste de la société et s’efforçant de maintenir étanche cette frontière invisible. La thèse en vaut une autre. Mais de quelle scientificité peut-elle se réclamer quand, face à la réalité sociale, ses défenseurs n’emploient aucune procédure d’investigation, et qu’au bout du compte ils l’observent en badauds ?

Intense promotion médiatique
Il est vrai qu’il s’agit, pour le reste, de dénoncer la politique d’Emmanuel Macron, perçue comme l’expression de ce désir bourgeois de défendre ses intérêts au détriment des autres classes sociales. Comment le reprocher aux auteurs ?, dira-t-on. Pourquoi seraient-ils les seuls citoyens de ce pays à ne pouvoir exprimer leurs opinions ? Sauf qu’ils ne cessent de prétendre les étayer « par des moyens sociologiques », ce qui est inexact, et que l’intense promotion médiatique du livre se fait au nom de cette supposée expertise, censée s’imposer, par un argument d’autorité, à la rationalité du lecteur, dont on ne sollicite en fait que les passions politiques.

Monique Pinçon-Charlot, soutenue par le Parti communiste, a été candidate à la députation en 2017 et cela, en revanche, n’est pas revendiqué. C’est d’ailleurs avec la même honnêteté flottante que les avis de l’économiste Liêm Hoang-Ngoc sont utilisés tout au long du livre pour garantir la rigueur de l’analyse des réformes macroniennes, sans qu’il soit jamais précisé qu’il a été, lui aussi, candidat aux législatives, sous les couleurs de La France insoumise.

Les Pinçon-Charlot aiment fouiller les origines et le parcours des puissants qu’ils épinglent. Très bien. Mais pourquoi ne pas appliquer à leurs propres engagements, à ceux de leurs amis, au caractère même de leurs travaux actuels, ce goût de la transparence ? Leur participation au débat public, sans cela, risque d’ajouter à la cacophonie ambiante, aux antipodes de la promesse d’élucidation que représente, quelle que soit sa nature exacte, la sociologie.Florent Georgesco

Le Président des ultra-riches. Chronique du mépris de classe dans la politique d’Emmanuel Macron, de Michel Pinçon et Monique Pinçon-Charlot, Zones, 170 p., 14 €.